Douleur chez le sujet âgé

La repérer et la traiter

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Publié le 13/05/2019
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DOULEUR

DOULEUR
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Très courante chez la personne âgée, la douleur est fréquemment sous-évaluée. Le senior a tendance à la banaliser, et les soignants éprouvent des difficultés à l’évaluer.

Il existe plusieurs types de douleurs. « Il y a les douleurs chroniques, qui concernent 30 % de la population et dont le pourcentage augmente avec l’âge, les douleurs de l’arthrose, qui surviennent souvent avec le vieillissement, les douleurs inflammatoires ou neuropathiques, qui occasionnent une gêne fréquemment sous-évaluée et parfois non identifiée, avec des patients qui souffrent en silence, surtout quand ils ont des troubles de la communication. Il y a également les douleurs aiguës, dans le cadre de l’urgence et les douleurs postopératoires », détaille le Pr Frédéric Aubrun, anesthésiste-réanimateur à l’hôpital de la Croix-Rousse.

Pour repérer et évaluer la douleur, il existe plusieurs échelles. « Si le patient est communicant, on peut utiliser les techniques d’autoévaluation, comme l’échelle EVA, qui propose au patient de placer un curseur sur une échelle horizontale. Ce n’est cependant pas le meilleur outil, car il nécessite une réglette, parfois difficile à comprendre », estime le Pr Aubrun. Il existe également une échelle numérique, allant de 0 (pas de douleur) à 10 (douleur maximale imaginable), ou encore l’échelle verbale simple (EVS) qui va de 0 (pas de douleur) à 4 (douleur extrêmement intense).

Néanmoins, ces échelles ne sont pas utilisables pour un patient non-communicant. Dans ce cas, le soignant peut utiliser des échelles d’hétéro-évaluation, permettant de détecter si le patient est en souffrance. Il existe par exemple l’échelle Algoplus ou l’échelle Doloplus (pour des douleurs chroniques), qui prennent en compte les mimiques, les attitudes antalgiques du patient, ses cris, etc.

Réduire les doses

Une fois évaluée, la douleur doit être traitée au plus tôt, ce qui passe par une stratégie multimodale. « Il faut associer des traitements et des techniques à sites d’action différents afin d’augmenter l’efficacité des traitements et de réduire les doses », préconise le Pr Aubrun.

Il existe trois paliers d’utilisation des antalgiques en fonction de l’évaluation de la douleur. Les antalgiques de palier 1 (paracétamol, anti-inflammatoires non stéroïdiens et aspirine) sont prescrits pour les douleurs faibles à modérées. Le paracétamol et les AINS sont à manipuler avec prudence en cas d’insuffisance hépatique ou rénale. Les AINS peuvent également occasionner des saignements digestifs. Le palier 2 comprend des antalgiques centraux opioïdes faibles (codéine, tramadol, poudre d’opium) pas toujours bien tolérés par les patients âgés, auxquels on peut associer des antalgiques périphériques, pour les douleurs modérées à intenses. Enfin, le palier 3 regroupe les antalgiques centraux forts comme la morphine et ses dérivés, pour les douleurs intenses à très intenses. « L’utilisation de ces médicaments doit être adaptée à l’âge des patients. En règle générale, pour des patients âgés, il faut baisser les doses, car ils ont des modifications de leur fonction rénale et hépatique », recommande le Pr Aubrun.

« Les limitations et les risques qui concernent le sujet âgé sont à connaître, mais laisser un patient souffrir c’est courir le risque majeur d’aggraver son pronostic. Une douleur persistante est en effet un facteur de risque de morbidité et de mortalité. Il faut donc veiller à administrer le bon médicament, à la bonne dose et par la bonne voie », conclut-il.

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin: 9749