Maladie de Parkinson : un marqueur sanguin identifié à Grenoble, la promesse d'une détection précoce

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Publié le 11/04/2022
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Crédit photo : S.Toubon

Une simple prise de sang pour diagnostiquer la maladie de Parkinson à un stade précoce ? Tel est l’espoir permis par un biomarqueur mis au point par les chercheurs du Grenoble Institut des neurosciences (GIN). La pathologie neurodégénérative, qui touche près de 7 millions de personnes dans le monde, est la plus répandue après celle d’Alzheimer. Or, la détection est encore tardive, et les premiers symptômes moteurs visibles n’apparaissent que plusieurs années après le début du processus neurodégénératif. « Avoir un résultat au travers d’une prise de sang afin d’améliorer le diagnostic permettrait de limiter l’errance thérapeutique des patients », indique David Mallet, chercheur au GIN.

Ce dernier a soutenu le 21 mars 2022 sa thèse en neurosciences, co-dirigée par Sabrina Boulet et Florence Fauvelle, qui a conduit à la découverte du biomarqueur métabolique. Celui-ci permet de détecter avec une précision de 82,6 % la maladie de Parkinson à un stade précoce. Un résultat issu de sept années de recherche, qui a conduit aussi à la publication en février dernier d’un article dans la revue américaine « The Journal of Clinical Investigation ».

Cette réussite est aussi la rencontre de deux approches du GIN. Celle de l’équipe « Physiopathologie de la motivation », à laquelle appartient Sabrina Boulet et qui travaille à mieux comprendre la maladie de Parkinson en reproduisant ses symptômes via des modèles animaux. Et celle de l’équipe « Neuro-imagerie et perfusion cérébrale » de Florence Fauvelle, qui est spécialiste de la métabolomique par résonance magnétique nucléaire (RMN). « Il s’agit de l’étude du métabolome, qui est l’ensemble des molécules produites par les organismes », précise-t-elle. « On s’est lancé dans ce projet parce qu’on voulait mieux caractériser le modèle rongeur [des phases précoces de la maladie] mis au point il y a quelques années dans l'équipe, et notamment en faisant une étude sur le métabolome », retrace Sabrina Boulet. « Maintenant, avec le recul, il était assez gonflé de faire ce lien entre des modèles comportementaux intégrés et le niveau moléculaire du métabolome », rebondit sa collègue.

Le métabolome de différents modèles animaux et de patients étudiés

Concrètement, les résultats issus de différents modèles animaux ont été confrontés : ceux des rongeurs de Grenoble, mais aussi ceux du Laboratoire de neurosciences expérimentales et cliniques de Poitiers et ceux des primates non humains de l’Institut des sciences cognitives Marc Jeannerod de Lyon. Les sérums de près de 200 animaux ont ainsi vu leur métabolome étudié par RMN. Ce qui ajoute à l’originalité de l’étude, c’est que les échantillons sanguins d’environ 120 patients ont également été analysés. Il s'agissait de patients dits « de novo », c’est-à-dire nouvellement diagnostiqués Parkinson et pas encore sous traitement, et issus de biobanques américaines et italiennes.

Le biomarqueur développé et sa précision ouvrent donc la voie à un diagnostic plus précoce, avant l’apparition de symptômes moteurs. Et potentiellement à de futurs traitements. « Il semble difficile de renverser le processus de mort des neurones [qui engendre la maladie de Parkinson], tempère toutefois Sabrina Boulet. Mais si nous le détectons suffisamment tôt, nous pourrions peut-être le stopper. » « Ou ne serait-ce que le ralentir », ajoute David Mallet. Un brevet est d’ores et déjà en cours de dépôt. Et un projet de recherche clinique devrait débuter dans les prochains mois.

Florian Espalieu

Source : lequotidiendumedecin.fr