Afin d’évaluer le potentiel de la méditation pour prévenir la survenue de démence, des chercheurs européens du groupe de recherche « Medit-Ageing »* ont soumis des personnes en bonne santé de plus de 65 ans à un entraînement de 18 mois à cette technique, connue pour ses bénéfices sur la réduction de la dépression, du stress ou de l’anxiété.
Publiée dans « JAMA Neurology », leur étude est partie d’observations antérieures sur les pratiquants assidus de la méditation. Chez les jeunes adultes, la méditation a déjà été associée à « des changements structurels et fonctionnels du cerveau principalement dans les réseaux frontaux et limbiques, l'insula et le cortex cingulaire antérieur étant les régions les plus sensibles à l'entraînement à la méditation », relèvent les auteurs, soulignant que ces régions sont sensibles au vieillissement.
Un potentiel à explorer sur le long terme
Pour explorer cette piste chez le sujet vieillissant, les chercheurs ont évalué, dans le cadre de l’essai « Age-Well », 136 sujets de 65 ans et plus (âge moyen de 69,4 ans, 60,6 % de femme), répartis en trois groupes : le premier a suivi le protocole de méditation, le deuxième dit de « contrôle actif » une période d’apprentissage de l’anglais, tandis que le troisième dit « contrôle passif » ne suivait aucune intervention. L’évaluation a porté sur le volume et la perfusion tissulaire de l’insula et du cortex cingulaire antérieur, ainsi que sur des paramètres cognitifs et socioaffectifs.
Après 18 mois d’intervention, les chercheurs n’ont pas observé de différence significative de volume et de perfusion du cortex cingulaire ou de l’insula chez le groupe pratiquant la méditation par rapport aux groupes contrôles. « Le fait qu’aucune différence anatomique n’ait été observée pourrait indiquer que, si la méditation peut modifier le volume de cerveaux plus jeunes et plus plastiques, 18 mois d’entraînement à la méditation ne sont pas suffisants pour modifier les effets du vieillissement », commente Gaël Chételat, dans un communiqué.
D’autres travaux ont pourtant montré des volumes cérébraux plus importants, en particulier dans le cortex cingulaire antérieur et l'insula, chez des sujets âgés méditants assidus, par rapport à des non-méditants. « Ces différences pourraient refléter les effets de la méditation à un âge plus jeune, une pratique intense de la méditation accumulée tout au long de la vie adulte et/ou des différences entre les groupes sur d'autres variables, telles que le mode de vie », avancent les auteurs.
En ce qui concerne la perfusion, les différences n'étaient pas statistiquement significatives mais proches des seuils. Les « différences moyennes entre les groupes, en faveur de méditation, étaient plutôt faibles (0,023 et 0,022, respectivement) mais pourraient représenter un gain substantiel par rapport à la moyenne », est-il relevé. Pour Gaël Chételat, « il pourrait être intéressant d’explorer [cette tendance, NDLR] sur un temps d’intervention plus long et/ou avec un échantillon de population plus important ». À cet effet, les participants de l’essai vont être suivis pendant quatre ans.
Un bénéfice certain sur le bien-être et l’épanouissement
Un autre résultat s’est en revanche révélé positif. Par rapport au groupe de « contrôle actif », le groupe de méditants a obtenu, sur une évolution de 18 mois, de meilleurs scores sur la régulation de l'attention, les capacités socio-émotionnelles et la connaissance de soi. « La pratique de la méditation montre ici son réel bénéfice sur la santé mentale des personnes âgées, avec une amélioration significative de paramètres propres au bien-être et à l’épanouissement, mais aussi au maintien des capacités attentionnelles et socio-émotionnelles rapportées par les participants », souligne Antoine Lutz, directeur de recherche l’Inserm et responsable de l’axe Méditation de l’étude. La compréhension des mécanismes sous-jacents sera l'un des axes étudiés au sein de l’essai « Age-Well ».
* Le groupe « Medit-Ageing », mené par la directrice de recherche à l’Inserm Gaël Chételat, du laboratoire Physiopathologie et imagerie des maladies neurologiques (Inserm/Université de Caen Normandie), regroupe des équipes du Centre de recherche en neurosciences de Lyon, de l’University College de Londres, de l’université de Liège et de l’université de Genève.
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