Un outil très sensible et très spécifique

La PCR sur la salive pour dépister le CMV chez les bébés

Publié le 07/06/2011
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L’INFECTION à cytomégalovirus (CMV) est l’infection congénitale la plus fréquente. Environ 80 à 90 % des enfants ayant une virurie positive sont asymptomatiques à la naissance et 5 à 15 % d’entre eux auront des séquelles, en particulier auditives. Mais actuellement, l’absence de dépistage néonatal systématique retarde notablement l’âge de diagnostic des surdités congénitales à CMV. Inversement, un dépistage de l’infection à CMV permettrait de mieux cibler la détection de la surdité afin de proposer une surveillance et une prise en charge aux âges critiques pour le développement de la communication orale.

La salive, un prélèvement aisé.

Différentes méthodes de diagnostic de l’infection congénitale à CMV ont été évaluées. Cependant, les méthodes fondées sur la culture des urines et de la salive ne se prêtent pas facilement à l’automatisation et ne peuvent donc pas être adaptées à un dépistage néonatal de grande ampleur.

En revanche, l’ADN viral peut être recherché par réaction de polymérisation en chaîne (PCR). Cette recherche peut être effectuée à partir du sang séché déposé sur le papier-filtre utilisé pour réaliser le test de Güthrie néonatal. Mais cela est également réalisable sur la salive, dont le prélèvement est particulièrement aisé.

C’est pourquoi S. B. Boppana et coll. ont entrepris une étude prospective, multicentrique destinée à évaluer le dépistage de l’infection à CVM chez les nouveau-nés par PCR en temps réel sur du liquide salivaire et sur salive séchée, la technique prise comme comparateur étant la culture rapide d’échantillons de salive prélevés à la naissance.

Une cinétique de la réaction.

La PCR en temps réel utilise le même principe que la PCR classique, c’est-à-dire l’amplification cyclique d’un fragment d’ADN fluorescent. Mais cette amplification est mesurée pendant que la réaction se poursuit, à mesure que le produit s’accumule, « en temps réel », pas à son issue comme dans la PCR classique. À chaque cycle d’amplification, la quantité d’ADN est mesurée grâce à un marqueur fluorescent dont l’émission est directement proportionnelle à la quantité d’amplicons, les fragments d’ADN produits. Cela permet d’obtenir une cinétique de la réaction, donc la quantification de l’ADN, alors que la PCR classique ne fournit que la mesure finale. L’intégralité du processus est automatisée, ce qui rend cette technologie très performante pour des applications d’analyses à grande échelle.

Parmi les 34 989 enfants de l’étude, la recherche de CMV a été positive par au moins l’une des trois méthodes comparées, PCR sur liquide salivaire, PCR sur salive séchée et culture rapide, chez 177 sujets, soit 0,5 % des enfants (intervalle de confiance à 95 %, 0,4 à 0,6 %).

Sur les 17 662 nouveau-nés chez lesquels une PCR en temps réel sur liquide salivaire a été réalisée, 17 569 sont apparus négatifs pour le CMV. Elle a été positive chez 85 enfants, de même que la culture rapide. Ainsi, la sensibilité et la spécificité de la PCR sur liquide salivaire ont été de 100 % et 99,9 % et ses valeurs prédictives positive et négative respectivement de 91,4 et 100 %.

Pour la salive séchée, testée chez 17 327 nouveau-nés, 74 avaient une PCR positive pour le CMV, la culture étant également positive chez 76 d’entre eux. La sensibilité et la spécificité de la PCR en temps réel sur salive séchée ont ainsi été de 97,4 % (intervalle de confiance à 95 %, 90,8 à 99,7 %) et 99,9 % (intervalle de confiance à 95 %, 99,9 à 100 %) respectivement. Les valeurs prédictives positives et négatives de ce test ont été de 90,2 et 99,9 % respectivement.

Ainsi, la PCR en temps réel sur salive liquide et séchée apparaît très sensible et très spécifique pour la détection de l’infection à CMV. Pour les auteurs de cette étude, ces examens devraient être considérés comme des outils de dépistage potentiel pour l’infection à CMV chez les nouveau-nés.

Boppana SB, et coll. Saliva Polymerase-Chain-Reaction assay for Cytomegalovirus screening in newborns. N Engl J Med 2011 ; 364 : 2111-8.

Dr GÉRARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 8977