Les états généraux de la prématurité

L’urgence d’une mobilisation pour un « Plan »

Publié le 14/10/2013
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CHAQUE ANNÉE en France 60 000 naissances sont prématurées, ce qui représente 6,6 % des naissances vivantes et 7,4 % des naissances (si l’on inclut les mort-nés). Elles provoquent deux tiers des décès avant le premier mois, 50 % des handicaps de l’enfant et hypothèquent la santé à l’âge adulte. En France, la situation s’aggrave. Non seulement l’incidence de la prématurité a augmenté, passant de 5,9 % à 7,4 % des naissances en quinze ans (de 1995 à 2010). Le Pr Elie Saliba, président de la SFN, chef de service en réanimation pédiatrique et néonatalogie (CHRU Tours) s’alarme de cette augmentation régulière de 22 % de la prématurité en quinze ans et de ses conséquences « sur 4 nouveau-nés qui décèdent dans le 1er mois, 3 sont prématurés ». Et, souligne le Pr François Goffinet, chef de service à la maternité Port-Royal, « si la surveillance prénatale ciblée diminue la prématurité, la prise en charge de prématurés de plus en plus petits pourrait augmenter le nombre de prématurés et le taux de handicaps. Cette question doit être évaluée ».

Derrière les chiffres, l’humain.

Charlotte Bouvard, présidente de l’association SOS Préma rappelle le long parcours des familles : « Derrière ces chiffres, qui permettent une prise de conscience, il y a l’humain. Vivez la prématurité et vous comprendrez… » et pointe les grandes disparités d’aide aux familles sur le territoire. Rendant « hommage au dévouement et à l’humanité des équipes médicales », Najat Vallaud-Belkacem a, elle aussi, souligné la dimension humaine : « Presque 120 000 parents se battent aujourd’hui aux côtés de leurs enfants nés trop tôt, pour commencer à créer une relation précaire », a-t-elle déclaré avant d’évoquer les facteurs de risques que sont les violences conjugales et la précarité et de rappeler l’importance des mesures gouvernementales visant à lever les freins pour que les femmes enceintes puissent rentrer très vite dans le parcours de soin (tiers payant, complémentaires santé, tests de grossesse en grandes surfaces). Le Pr Goffinet et le Pr Dominique Luton, chef du département de gynécologie obstétrique, Hôpital Beaujon, ont évoqué ces grandes précarités : « En 2013 toutes les nuits, à Paris, dans le hall de la maternité on héberge des femmes enceintes en grande précarité, avec des enfants en bas âge. »

Dix propositions pour la prématurité.

Comment insuffler une dynamique de réflexion autour de la prématurité, attirer l’attention des pouvoirs publics, des médias et des opinions publiques provoquer une prise de conscience pour un « plan prématurité ». Les états généraux, s’y emploient. Dix propositions pour la prématurité sont émises. En amont de la prématurité d’abord, pour limiter et prévenir les facteurs de risque (information ou consultation pré-conceptionnelle, lutte contre la précarité périnatale, détection des facteurs de risque par une consultation précoce et des réévaluations au cours de la grossesse pour identifier et orienter les patientes à risque vers une filière adaptée). Toujours en amont, le collectif propose de développer la recherche sur la pré-éclampsie et le retard de croissance intra-utérin (RCIU), grands pourvoyeurs de prématurité. Face la prématurité, les propositions visent à soutenir les parents (congés père et mère, leur ouvrir un accès non limité aux unités d’hospitalisation et les intégrer aux soins, former les soignants à cette ouverture, adapter l’architecture), mieux coordonner les soins (transferts in utéro, parcours de soin), évaluer la politique périnatale (données systématiques) et faire progresser la recherche clinique (épidémiologie périnatale, compréhension des troubles cognitifs et comportementaux de l’enfant né prématuré pour mieux le prendre en charge).

 Dr SOPHIE PARIENTÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9271