Pr Florence Bretelle, AP-HM : « La vaginose bactérienne multiplie par six le risque de naissance avant terme »

Publié le 01/02/2024
Article réservé aux abonnés

L’équipe du pôle Femmes, parents, enfants de l’Assistance publique – Hôpitaux de Marseille (AP-HM), sous la direction de la Pr Florence Bretelle, a publié les résultats de l’étude AuTop sur le rôle de la vaginose bactérienne dans la prématurité et l’intérêt d’un nouveau test de dépistage moléculaire. La prématurité est la première cause de morbi-mortalité néonatale. Chaque année en France, près de 55 000 enfants naissent avant terme.

Crédit photo : Claude ALMODOVAR

LE QUOTIDIEN : Quels sont les principaux résultats de l’étude AuTop ?

Pr FLORENCE BRETELLE : Menée dans 19 centres en France, l’étude randomisée AuTop nous a permis d’évaluer une stratégie innovante de dépistage par biologie moléculaire et de traitement de la vaginose bactérienne lors de la grossesse chez des femmes considérées à bas risque.

Parmi les 6 671 femmes incluses, les résultats ont montré une réduction de 40 % de la prématurité chez les patientes primipares ayant bénéficié de cette stratégie. L’environnement infectieux et inflammatoire créé par la vaginose bactérienne multiplie par six le risque de naissance avant terme. C’est pourquoi son dépistage lors de la grossesse est primordial. Mais elle est parfois asymptomatique. Les scores cliniques et biologiques utilisés jusqu’à présent sont insuffisants face à ce problème de santé publique.

Quelles sont vos recommandations à l’issue de cette étude ?


F. . : Depuis 10 ans, nous travaillons sur ce sujet. Nous avons mis en évidence le lien entre vaginose bactérienne et risque de naissance avant terme. Mais de nombreuses femmes ne sont pas dépistées, en raison du manque de spécificité et de sensibilité des tests cliniques et biologiques classiques. Nous avons ainsi développé et breveté un test moléculaire, dont nous avons testé l’efficacité dans l’étude. Une femme sur deux est concernée par une vaginose en moyenne, et beaucoup l’ignorent.

Je recommanderais aux médecins généralistes qui voient les patientes en tout début de grossesse, de procéder à une recherche systématique d’infection vaginale, avec des tests moléculaires idéalement, ou avec les tests cliniques et biologiques. Nous espérons que nos résultats inciteront à mettre en place un dépistage systématique des anomalies de la flore vaginale chez les femmes primipares.

Quelles sont les prochaines étapes ?


F. . : Au cours de l’étude AuTop, près de 20 % des patientes diagnostiquées n’ont finalement pas été traitées. Les délais de remise des résultats sont probablement en cause. C’est pourquoi nous travaillons à la mise au point d’un test antigénique rapide. Nous explorons aussi la piste selon laquelle la vaginose bactérienne serait une infection sexuellement transmissible, ce qui n’a pas encore été démontré.

Dans la continuité de nos premiers travaux, nous venons d’obtenir le financement pour AuTop 2 dans le cadre du programme hospitalier de recherche clinique 2023 par la Direction générale de l’offre de soins. Le premier volet de recherche concernait des femmes à bas risque, la nouvelle étude consistera cette fois à évaluer la stratégie de dépistage des anomalies de la flore vaginale en population à haut risque de prématurité. Cette nouvelle étude randomisée et multicentrique devrait démarrer en 2024.


F. retelle et al., JAMA Pediatr. 2023;177(9):894-902. doi :10.1001/jamapediatrics.2023.2250

Propos recueillis par Neijma Lechevallier

Source : lequotidiendumedecin.fr