Ronflements nocturnes

Quelles explorations ?

Publié le 10/11/2016
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Les études épidémiologiques montrent qu’un enfant sur 10 ronfle, et qu’un enfant ronfleur sur 5 présente des anomalies ventilatoires ou de l’architecture de son sommeil. La description de syndromes d’apnées du sommeil (SAS) chez les enfants est ancienne, mais les modalités d’explorations et de prise en charge ont fait l’objet d’avancées spectaculaires ces dix dernières années.

En cas de ronflement permanent, même en dehors des épisodes infectieux rhinopharyngés, il faut savoir creuser l’interrogatoire et rechercher des symptômes évocateurs d’un trouble respiratoire objectif du sommeil (TROS) : la respiration buccale, l’asynchronisme entre les mouvements thoraciques et abdominaux, les pauses respiratoires suivies d’un bruit de reprise inspiratoire, l’hyperextension de la tête, plus rarement les sueurs abondantes ou les céphalées matinales. La réalisation d’une vidéo par les parents peut faciliter la description des signes cliniques. Une énurésie persistante, une fatigue anormale voire une somnolence diurne, un infléchissement des résultats scolaires, ou le ralentissement de la croissance doivent également alerter chez un enfant ronfleur.

L’obstruction des voies aériennes supérieures est le plus souvent liée à une hypertrophie du tissu lymphoïde ou une anomalie de la croissance maxillo-faciale. La naso-fibroscopie permet une évaluation des structures anatomiques impliquées. Les prises en charge ORL (adéno-amygdalectomie) et orthodontique (pose de distracteur palatin) sont en première ligne des traitements du SAS chez l’enfant. Elles permettent de rétablir une respiration nasale efficace, sans ronflement ni augmentation du travail respiratoire nocturne. Penser également à dépister et traiter les rhinites allergiques ! Les corticoïdes par voie nasale et les antileucotriènes ont démontré leur efficacité dans les SAS légers. L’abstention thérapeutique est la règle dans les ronflements isolés, mais une surveillance clinique doit être mise en place : un tiers des enfants d’âge scolaire ronfleurs simples évoluent vers un SAS dans les 4 ans.

Exploration du sommeil dans les formes sévères

En cas de doute diagnostic ou dans les formes d’emblée sévères ou syndromiques, une exploration du sommeil est indispensable. L’accès à ce type d’enregistrements est encore limité en pédiatrie, mais l’offre de soins tend à se développer avec la simplification des procédures. Les polygraphies ambulatoires sont dorénavant validées chez l’enfant. Il faut cependant confier ce type d’explorations à des équipes ayant l’expérience de la lecture de tracés pédiatriques (ne jamais se fier à une analyse automatique !), et savoir aller jusqu’à l’enregistrement polysomnographique complet en hospitalisation dans les cas douteux ou complexes.

Le recours à une ventilation non invasive nocturne est rare chez les enfants sains par ailleurs, mais est devenu d’usage courant chez nos patients avec pathologies malformatives, neuromusculaires, ou métaboliques.

L’obésité morbide est également un facteur de risque majeur de SAS, en pleine expansion chez les adolescents. Nous disposons maintenant de masques et de ventilateurs adaptés à tous les âges et gabarits, des centres experts dans ces pathologies se sont créés sur tout le territoire français.

L’épidémiologie du SAS va probablement se modifier dans les années à venir. Véritable épidémie à laquelle sont confrontés nos collègues d’adultes (530 000 patients sous PPC en France en 2013), le fait de traiter certains patients dès l’enfance ne va-t-il pas prévenir l’apparition du SAS chez l’adulte ?

CHU Charles Nicolle, Rouen

Dr Marc Lubrano-Lavadera

Source : Bilan Spécialiste