Dépistage des troubles auditifs chez l’enfant

Un diagnostic encore trop tardif

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Publié le 05/04/2018
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depistage surdité

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Crédit photo : BURGER/PHANIE

En Occident, la surdité touche 1 à 3 enfants sur 1 000 à la naissance. Un autre nourrisson sur 1 000 développera une surdité dans sa première année de vie et 6 enfants sur 1 000 deviendront sourds entre un et vingt ans.

« Chez le nourrisson, c’est la surdité de perception affectant l’oreille interne qui est l’atteinte la plus représentative des troubles auditifs, à l’opposé de l’enfant plus grand où la surdité de transmission par otite séromuqueuse (OSM) est la plus fréquente », explique le docteur Élisabeth Peri Fontaa, ORL-audiophonologiste à Strasbourg. Elle regrette cependant que, « malgré les progrès techniques et les campagnes de sensibilisation, le diagnostic de la surdité chez l’enfant soit encore trop tardif » puisqu’elle est encore « le plus souvent mise en évidence à la fin de la période de plasticité cérébrale optimale de l’acquisition langagière », soit après ses 2 ans. Ce retard occasionne une perte de chance pour l’enfant dont « les troubles durables du développement langagier grèvent ses acquisitions scolaires, professionnelles et son autonomisation sociale », constate le Dr Peri Fontaa.

Faire un bilan au moindre doute

Quelles que soient les causes de la surdité (génétiques, liées à la grossesse, à la prématurité, à une naissance difficile à une méningite ou inconnues), le Dr Peri Fontaa rappelle que le dépistage néonatal « permet d’orienter rapidement les enfants ayant échoué au test obligatoire effectué en maternité vers un bilan plus complet et une prise en charge précoce en cas de diagnostic d’une surdité ». Elle insiste sur le fait qu’ « un test échoué ne signifie pas automatiquement une surdité, de même qu’un test réussi signifie que l’audition est normale uniquement au moment où le test a été réalisé et qu’un suivi ultérieur reste fondamental ». Il est important que « l’anxiété générée chez les parents par ce test soit anticipée et désamorcée par les équipes soignantes, en expliquant simplement son rôle », tient-elle toutefois à ajouter. Si « les signes d’appel d’une surdité sont différents selon l’âge de l’enfant », le Dr Peri Fontaa alerte sur « les discours rassurants du type : "Il est visuel", "Ça va venir" ou pire : "Pas de bilan auditif possible ou fiable avant 5 ans" » qui sont distillés à des parents inquiets par « l’entourage ou même certains médecins ». Selon elle, il est fondamental d’évaluer « les réactions au monde sonore dans la vie quotidienne, les caractéristiques des productions vocales et la qualité des interactions » et bien qu’il soit facile de passer à côté d’une surdité, certains signes cliniques sont évocateurs : « non-réactions » au monde sonore, productions vocales pauvres, difficultés relationnelles… Dans l’idéal, le Dr Peri Fontaa estime donc qu’il faudrait « être systématique et demander un bilan auditif une fois par an jusqu’à 6 ans si l’enfant a un facteur de risque ou s’il y a le moindre doute lié à son comportement ou exprimé par les parents ».

Benoît Thelliez

Source : Le Quotidien du médecin: 9654