Asthme sévère avec ou sans polypose nasale, BPCO

Cibler les éosinophiles en pneumologie

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Publié le 16/10/2020
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es éosinophiles sont-ils bien une cible adéquate pour  la prise en charge en pneumologie ? C’est ce que tendent à démontrer les études ANDHI et ETHOS, respectivement dans l’asthme sévère et la BPCO.
Une qualité de vie améliorée

Une qualité de vie améliorée
Crédit photo : Phanie

« L’éosinophile est au centre de toutes les manifestations physiopathologiques que l’on rapporte à l’asthme », indique le Pr Pascal Chanez, pneumologue à l’hôpital Nord de Marseille (AP-HM).

Or, « plus on a d’éosinophiles, plus on est enclin à avoir des exacerbations ou des symptômes de brève durée », ajoute-t-il. « En les ciblant on peut donc agir sur les manifestations de la maladie asthmatique », explique le médecin, en particulier chez les patients souffrant d’un asthme sévère à éosinophiles. C’est ce que font certaines biothérapies, notamment le benralizumab, un anti-interleukine-5 qui, en se fixant au récepteur de l’IL-5 exprimé à la surface des éosinophiles, induit leur apoptos.

Si deux études, SIROCCO et CALIMA, ont déjà évalué l’efficacité du benralizumab chez des patients présentant un asthme sévère à éosinophiles réfractaire, aboutissant à la mise sur le marché de la molécule (Fasenra), l’étude ANDHI apporte de nouveaux résultats pour le traitement des symptômes rhino-sinusiens chez ces malades.

Effets en cas de polypose nasale

Cet essai clinique de phase IIIb, multicentrique et randomisé en groupes parallèles a évalué l’efficacité du benralizumab chez des adultes présentant un asthme sévère à éosinophiles non contrôlé malgré un traitement de référence. Au total, 431 patients ont été randomisés dans le groupe benralizumab (30 mg toutes les huit semaines) et 229 dans un groupe placebo.

Comme démontré précédemment, le taux d’exacerbations annualisé à la 24e semaine (critère de jugement principal) est significativement réduit de 49 % (35 à 61 ; p ≤ 0,0001) dans le groupe traité (0,94) par rapport au groupe placebo (1,86).

Une sous-étude polypose nasale (PN) a inclus 23 % (153/656) de l’ensemble de la population traitée de l’étude (benralizumab : n = 96 ; placebo : n = 57). Ce sous-groupe révèle que le taux d’exacerbations annualisé à la 24e semaine (critère principal) est diminué de 69 % (50 % à 81 % ; p < 0,0001) dans le groupe benralizumab (0,77) vs placebo (2,49).

« Dans ce sous-groupe, l’efficacité du benralizumab sur les exacerbations est donc plus importante que dans le groupe total », fait remarquer le Pr Chanez. « Même chose au niveau de la qualité de vie puisqu’il y a non seulement un effet sur la maladie asthmatique mais également sur le fardeau que sont la rhinosinusite chronique et la polypose chez ces patients », ajoute-t-il.

Corticoïdes et éosinophiles dans la BPCO

Dans la BPCO, un certain nombre d’études rétrospectives menées sur des essais randomisés ont mis un évidence un lien entre taux d’éosinophiles sanguins et bénéfice d’un corticoïde inhalé à un bronchodilatateur en termes de prévention des exacerbations. Une nouvelle étude, randomisée, vient confirmer ces données, l’étude ETHOS (1).

Cet essai de phase III, en double aveugle, avec quatre groupes parallèles, sur 52 semaines a été mené chez 8 509 patients présentant une BPCO modérée à très sévère avec antécédent d’exacerbations modérées à sévères.

Les patients ont été randomisés en quatre bras : deux bras avec deux dosages de budésonide (320 ou 160 µg)/glycopyrronium/formotérol ; un bras glycopyrronium/formotérol ; un bras budésonide/formotérol. Avec comme critère de jugement principal le taux d’exacerbations modérées à sévères, « on a l’impression qu’ajouter un corticoïde au bras double bronchodilatation apporte réellement un bénéfice en termes d’exacerbation », indique le Pr Chanez.

Par ailleurs, plus le taux d’éosinophiles sanguins augmente, plus l’effet d’atténuation des corticoïdes inhalés sur la survenue d’exacerbations est important, « ce qui renforce des données obtenues dans de précédentes études », souligne-t-il. La qualité de vie (score SGRQ) était améliorée de façon plus importante dans le bras triple par rapport aux deux autres bras.

Enfin, « résultat surprenant, on observe une réduction très nette de la mortalité toutes causes dans le bras triple thérapie 320 µg par rapport à la double bronchodilatation », conclut le pneumologue

(1) K.F. Rabe et al. N Engl J Med 2020 DOI: 10.1056/NEJMoa1916046
D’après une conférence de presse d’AstraZeneca

Stéphany Mocquery

Source : Le Quotidien du médecin