Comment gérer la prise en charge d’un patient ayant besoin d’une oxygénothérapie à domicile ? Voilà une question qui, avec l’épidémie de Covid-19, a pris une dimension particulière, pour les pneumologues mais aussi pour les généralistes. « Selon des chiffres fournis en novembre 2020 par les prestataires, environ 30 000 patients ont été mis sous oxygène durant la première puis la deuxième vague de l’épidémie. C’est un chiffre tout à fait considérable. Et cette oxygénothérapie concerne désormais des patients pour lesquels cette prise en charge était jusque-là difficilement envisageable. En temps ordinaire, classiquement, le patient type placé sous oxygène est un malade de 60 ans, ex-fumeur atteint d’une BPCO. Mais, aujourd’hui, on voit des personnes de 50 ans, actives, qui peuvent se retrouver avec une oxygénothérapie à domicile en urgence, sans avoir le temps d’y être préparées », indique le Pr Jesus Gonzalez-Bermejo, chef de service du SSR respiratoire de l’hôpital de Pitié Salpêtrière et professeur à la faculté de médecine Sorbonne-Université.
Le Pr Gonzalez-Bermejo et le Groupe assistance ventilatoire et oxygène (GAVO2) de la Société de pneumologie de langue française (SPLF) ont rédigé des recommandations pratiques, que peuvent consulter les généralistes sur le site de la société savante.
De son côté, la Haute autorité de santé (HAS) a aussi publié des recommandations. « La prise en charge à domicile des patients atteints de Covid-19 et requérant une oxygénothérapie, dans le cadre d'un parcours de soins coordonné entre la ville et l'hôpital, doit être exceptionnelle et réservée au contexte épidémique actuel », souligne la HAS, en précisant que cette prise en charge est réservée à deux situations : les patients hospitalisés pour Covid-19, sortant sous oxygénothérapie, et ceux atteints de Covid-19 non hospitalisés, ayant des besoins en oxygène inférieurs à 4 l/min. « Cette prise en charge est mise en place dans le cadre d’une équipe pluriprofessionnelle de premier recours, en lien avec une équipe hospitalière de référence (pneumologie, maladies infectieuses, soins critiques, …) et le SAMU », indique la HAS, en précisant que l’objectif de l’oxygénothérapie est de maintenir une SpO2 > 92 %.
De son côté, la SPLF estime que l’oxygène doit être utilisé en cas de pneumopathie grave à Covid-19, probablement dès que la SpO2 < 92 %, avec une cible de SpO2 entre 92 et 96 %. « Il faut se rendre compte que tout n’est pas possible au domicile, et notamment des hauts débits pendant de longues heures. Des humidificateurs sont possibles sur les extracteurs mais sont à éviter, pour éviter une aérosolisation de virus », indique la société savante.
La surveillance est particulièrement importante pour les malades encore en phase aiguë. « Il est conseillé, pour ces malades, d’effectuer une surveillance étroite au moins les premières 48 à 72 heures. L’identification d’un médecin qui pourra se déplacer auprès du malade est nécessaire. Si le médecin prescripteur n’est pas le médecin qui passera au domicile, un contact doit être pris entre les deux praticiens », indique la SPLF. Au minimum, il est conseillé de faire surveiller par un tiers la SpO2, la fréquence respiratoire et la clinique (dyspnée), idéalement toutes les 4 heures selon l’évolution. « Il ne faudra pas oublier que chez des malades aussi sévères, il n’y a aucune autonomie possible à domicile. La sécurité du malade et de ses soins dépendra d’un tiers et doit être vérifiée (présence familiale ou d’aidants, personnel de santé passant à domicile ou structures d’hospitalisation à domicile, peuvent être sollicitées) », souligne la SPLF.
Une éducation des personnes à domicile à l’utilisation de l’oxygène est nécessaire. Elle sera faite par le prestataire, qui rappellera les règles de sécurité d’utilisation. « La fourniture d’une feuille ou carnet de surveillance à remplir par les aidants pourra être utile au médecin généraliste et au pneumologue ultérieurement », indique la SPLF.
Un rendez-vous avec un pneumologue est utile après J15 si le patient reste oxygéno-requérant. « La prescription d’O2 à plus long terme, mais surtout d’outils pour la mobilité (comme des extracteurs portables) incombe au pneumologue », indique la SPLF, en ajoutant que le sevrage de l’oxygénothérapie doit nécessiter une prescription médicale. « Un avis du pneumologue dans les 15 jours suivant l’installation de l’oxygénothérapie est fortement recommandé », souligne la société savante.
Entretien avec le Pr Jesus Gonzalez-Bermejo , chef de service du SSR respiratoire de l’hôpital de Pitié Salpêtrière
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