De nouvelles recommandations sur la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) et les fibroses pulmonaires progressives non FPI (liées à des causes connues telles que l’hypersensibilité et les connectivites), ont été établies, à l’initiative du centre coordonnateur de référence des maladies pulmonaires rares de l’adulte, sous l’égide de la Société de pneumologie de langue française (SPLF), du réseau OrphaLung et de la filière de soins des maladies rares RespiFIL (1).
Dyspnée, toux sèche et crépitants
Il y a 6 à 8 000 patients atteints de FPI en France — principalement des plus de soixante ans — et même 15 000 en incluant les fibroses progressives non FPI. Il faut y penser devant un essoufflement d’installation progressive, trop souvent mis, à tort, sur le seul compte de l’âge, du surpoids, du déconditionnement, a fortiori chez un fumeur ou chez un patient avec une pathologie cardiaque. La toux sèche, rebelle, qui touche 30 à 50 % de ces patients, suit une évolution parallèle à celle de la fibrose.
« La présence d’une dyspnée anormale et/ou d’une toux persistante nécessite de rechercher des râles crépitants (type velcro) à l’auscultation pulmonaire et, lorsque c’est le cas, de demander un scanner thoracique sans injection en coupes millimétriques pour retrouver une éventuelle pathologie interstitielle. Si elle est confirmée, le patient doit être adressé au pneumologue sans tarder pour faire la différence entre FPI, pneumopathies d’hypersensibilité fibreuses, fibroses associées aux connectivites (sclérodermie, polyarthrite rhumatoïde…), formes inclassables, etc. », rappelle le Pr Vincent Cottin (Lyon), premier auteur des nouvelles recommandations. Le scanner est typique de FPI dans environ 50 % des cas ; sinon, une confirmation histologique est nécessaire. Outre la biopsie pulmonaire vidéochirurgicale, il est maintenant possible de réaliser une cryobiopsie transbronchique. Alternative en cas de contre-indication à la biopsie : se donner un temps d’observation de quelques mois, une aggravation de la maladie confirmant le « diagnostic de travail » initial.
Ausculter et profiter des autres scans
Plus le patient est pris en charge précocement, plus vite le traitement va débuter. Il existe plusieurs pistes pour diminuer le retard actuel au diagnostic. Le généraliste y tient la première ligne. « Devant tout essoufflement et/ou toux sèche, il faut rechercher les crépitants à l’auscultation pulmonaire, insiste le Pr Cottin. Ensuite, lorsqu’on réalise un scanner thoracique, même pour un tout autre motif (coroscanner par exemple), il ne faut pas rater la présence d’anomalies interstitielles. Leur découverte impose systématiquement un avis pneumologique, pour ne pas perdre de temps. Troisième piste : il faut penser aux formes familiales de fibrose. Lorsqu’elles sont associées à une mutation de gènes associés aux télomérases, les patients concernés sont souvent plus jeunes que la moyenne, ont eu les cheveux blancs avant la trentaine et/ou présentent des anomalies hépatiques ou hématologiques inexpliquées. Dans ces situations, cela vaut la peine de demander si des proches se plaignent d’essoufflements ou de toux sèche. Il n’y a pas de dépistage officiel recommandé, mais il est souvent utile de poser ces questions et en cas de réponse positive, de rechercher des crépitants et parfois, de proposer un conseil génétique. »
Des nouveautés thérapeutiques
Dans les FPI, on sait maintenant que les immunosuppresseurs sont délétères et donc contre-indiqués, à l’exception d’éventuels corticoïdes à petites doses pour la toux sèche (10 mg de prednisolone par jour pendant quelques semaines). Deux antifibrosants sont à disposition : le nintédanib et le pirfénidone, dont l’efficacité est équivalente. Ils ralentissent de moitié la vitesse d’aggravation de la maladie et sont donnés à vie. Leur tolérance est imparfaite : le pirfénidone entraîne une photosensibilité et souvent une anorexie. Le nintédanib entraîne des diarrhées. Avec le nintédanib, l’association aux anticoagulants est à éviter.
Pour les fibroses pulmonaires progressives non FPI, le traitement dépend d’abord de la cause : éviction de l’antigène responsable dans les pneumopathies d’hypersensibilité, immunosuppresseur ou corticoïdes dans les connectivites et antifibrosant si la fibrose continue d’évoluer malgré tout : nintédanib, à défaut, s’il est mal toléré ou contre-indiqué, la pirfénidone hors AMM.
La surveillance est réalisée par l’équipe spécialisée suivant le patient, mais le généraliste a aussi sa place pour repérer une comorbidité fréquemment associée à la FPI : c’est le cas des syndromes d’apnées du sommeil, des comorbidités cardiovasculaires — une échocardiographie lors du diagnostic est utile et il est conseillé d’en refaire une annuellement — un reflux gastro-œsophagien, à traiter par les inhibiteurs de la pompe à protons, une dénutrition (d’autant qu’elle aggrave le pronostic de la FPI). La réhabilitation respiratoire et l’entretien musculaire doivent être encouragés.
« Il faut savoir qu’en cas d’exacerbations, qui correspondent à des poussées de fibrose, la dyspnée augmente de façon très marquée en moins d’un mois. La recommandation est de faire un scanner thoracique en urgence, avec injection pour rechercher une embolie pulmonaire et sans injection, pour rechercher des signes d’exacerbation (augmentation de l’aspect de verre dépoli en plus de la fibrose habituelle), explique le Pr Cottin. Si la poussée est avérée, il faut adresser le patient au pneumologue et même l’hospitaliser en urgence : un essai français ayant montré que le cyclophosphamide était délétère, le traitement repose désormais sur une couverture antibiotique et des corticoïdes ».
Exergue : Les anomalies peuvent être découvertes par hasard
Entretien avec le Pr Vincent Cottin (CHU Lyon), premier auteur des nouvelles recommandations (1) has-sante.fr/jcms/p_3278607/fr/fibrose-pulmonaire-idiopathique
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