Les recommandations américaines marquent le pas dans l’asthme

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Publié le 15/02/2021

À rebours des dernières publications internationales, les recommandations américaines dans l’asthme laissent peu de place aux thérapies ciblées et ne préconisent pas de bithérapie d’emblée dans les premiers stades de l’asthme.

Crédit photo : phanie

La mise à jour des recommandations américaines de prise en charge de l’asthme définit six stades de la maladie. La maladie asthmatique était depuis longtemps divisée en seulement cinq stades, que ce soit dans les recommandations françaises, pour le Gina, et dans les précédentes recommandations américaines. « Dans cette nouvelle édition, les asthmes sévères ont été divisés en deux : ceux relevant d’un traitement inhalé, dits de stade 5, et ceux relevant d’une corticothérapie orale au long cours ou d’une thérapie ciblée, dits de stade 6. Cela dans une approche probablement plus économique que purement médicale, ces recommandations faisant une place limitée aux thérapies ciblées, réservées ici au traitement de seconde ligne », résume la Pr Chantal Raherison-Semjen, présidente de la SPLF, CHU de Bordeaux.

Pas de bronchodilatateurs de longue durée systématiques dans l’asthme modéré persistant

« Plus étonnant, vu les nombreuses études, néanmoins peu concluantes, menées ces dernières années, ces recommandations ne prônent pas de bithérapie systématique dans l’asthme léger à modéré persistant (stade 2) en première ligne », souligne la Pr Raherison-Semjen. Le traitement recommandé est une corticothérapie inhalée à faible dose systématique, associée à un bronchodilatateur à courte durée d'action (B2CA) à la demande.

Au stade 3, ces recommandations américaines préconisent des corticoïdes inhalés à faible dose associés à un bronchodilatateur à longue durée d'action (B2LA). La dose de corticoïde est augmentée au stade 4, et le recours aux hautes doses est préconisé aux stades 5-6. Lors d’aggravation, il est recommandé non plus d'ajuster la dose de corticoïdes inhalés mais d'ajouter un antimuscarinique de longue durée d’action, en particulier au stade 5.

« À la différence de ces recommandations américaines, en France comme pour le Gina, les asthmes non contrôlés sous traitement inhalé à forte dose ne relèvent pas en première intention d’un traitement corticoïde par voie orale au long cours », souligne la Pr Raherison-Semjen. Cela en raison de la morbimortalité et du risque de diabète, d’ostéoporose, de fractures, et de problèmes oculaires associés à la corticothérapie générale au long cours. « Dans l’asthme sévère, on préfère discuter en première intention du traitement en fonction du phénotype, pour poser l’indication d’une thérapie ciblée, anti-IgE ou anti IL5. Une corticothérapie générale au long cours n’est envisagée qu’en dernière intention », explique la pneumologue.

Désensibilisation : pas vraiment recommandée faute de preuves

« Sur le versant de la désensibilisation par voie sous-cutanée dans l’asthme allergique, ces recommandations restent prudentes », se félicite la Pr Raherison-Semjen. En effet, autant on dispose de données d’efficacité robustes dans la rhinite allergique, autant elles font défaut dans l’asthme. C’est pourquoi, que ce soit Outre-Atlantique ou en France, la désensibilisation est indiquée face aux rhinites allergiques, pas dans le traitement de fond de l’asthme sans corticothérapie inhalée.

 

Entretien avec la Pr Chantal Raherison-Semjen

(1) MM Cloutier et al. Managing Asthma in Adolescents and Adults2020 Asthma Guideline Update From the National Asthma Education and Prevention Program. JAMA 2020; 324:2301-17

(2) S Lovinsky-Desir et al. Evolving Strategies for Long-term Asthma Management. JAMA 2020; 324:2265-67

 

Pascale Solère

Source : lequotidiendumedecin.fr