Dr Thomas Funck-Brentano, Hôpital Lariboisière

Des données rassurantes à l'ASBMR sur les traitements de l’ostéoporose

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Publié le 31/10/2019

Alors que l’épidémiologie de l’ostéoporose reste préoccupante, de nouveaux facteurs prédictifs de fragilité osseuse se révèlent. Les craintes vis-à-vis d’un effet délétère sur l’athérosclérose de la supplémentation vitamino-calcique ou des anticorps anti-sclérostine semblent infirmées. Récemment approuvé par l’EMA, le romososumab est attendu pour les personnes à très haut risque. Retour sur les temps forts du congrès de l'ASBMR (20-23 septembre).

Crédit photo : DR

Un travail réalisé par la NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey) montre aux USA une diminution du nombre total de factures ostéoporotiques entre 2010 et 2014, malgré une augmentation des fractures de la hanche et du fémur. Les coûts liés à l’ostéoporose s’envolent puisqu’ils augmentent de 120% en 10 ans (atteignant près de 74 milliards de dollars), des données qui peuvent être extrapolées à l’Europe.

Prédiction du risque de fracture

Deux études soulignent la place de la NFS comme marqueur de vulnérabilité à l’ostéoporose. Ainsi, l’anisocytose des globules rouges, qui augmente avec le vieillissement est corrélée au risque de fractures de hanche chez les hommes de plus de 70 ans, y compris après ajustement sur le FRAX ou la densité minérale osseuse (DMO). Le mécanisme sous-jacent reste inconnu et ce marqueur pourrait être le reflet de l’état global de santé. Chez les femmes cette fois-ci, la cohorte suédoise SUPERB (plus de 3000 femmes entre 75 et 80 ans suivies pendant 3 ans) met en évidence une relation entre une hémoglobine inférieure à 12g/l et un risque doublé de fracture majeure ostéoporotique en lien avec une altération de l’os cortical.

La même cohorte suédoise montre que les fractures vertébrales (FV) de grade 1 authentifiées par VFA (vertebral fracture assessment) ont la même valeur prédictive du risque de fracture majeure incidente que les FV de grade 2 ou 3, ce risque étant ici doublé dans les 3 ans de suivi quel que soit le grade.

Prévention : du muscle et une supplémentation réfléchie

Si la perte de poids s’associe à une perte osseuse et majore le risque de fracture, une importante cohorte canadienne en population générale (Manitoba) montre que c’est la perte de la masse maigre et non de la masse grasse qui s’associe à une augmentation de la mortalité et du risque de fracture majeure, indépendamment du FRAX et de la DMO. L’étude de Framingham montre que l’accumulation de graisse viscérale s’associe à une perte de la densité musculaire. Ceci souligne le lien étroit entre os et muscle, comme le confirme une autre étude rapportant un gain de masse osseuse corticale suite à un entrainement militaire américain de seulement 8 semaines.

 L’étude VITAL montre que la supplémentation par 2000 UI/j de cholecalciférol chez des sujets sains n’améliore pas la DMO volumique et ne réduit pas non plus le risque de chutes. « Ces résultats négatifs ne peuvent pour autant pas être extrapolés aux personnes ostéoporotiques ou carencées» prévient le Dr Funck-Brentano.

On peut en revanche être rassuré sur le risque vasculaire d’une supplémentation vitamino-calcique. La supplémentation en vitamine D jusqu’à 10 000 UI/jour associé à 1200mg de calcium pendant 3 ans n’augmente pas les calcifications vasculaires périphériques au scanner haute résolution. D’autre part, la supplémentation en calcium à 1200 mg/j ne favorise pas plus l’athérosclérose que les apports alimentaires aux mêmes doses.

Relai après dénosumab

Quel est le risque de perte osseuse un an après relai par un bisphosphonate suivant l’arrêt du denosumab (Dmab) ? Après un relai par alendronate (ALN, Etude DAPS), 20% des participantes avaient une perte de DMO d’au moins 3% au col en un an. Le risque de perte osseuse après relai était plus élevé chez celles qui avaient eu les gains les plus importants sous Dmab. Une autre étude avec le zolédronate suggère qu’une perfusion de relai trop précoce (avant 6 mois) serait également plus à risque de perte osseuse qu’une perfusion réalisée 7 mois après la dernière injection de Dmab (Etude DATA-HD).

Les dernières nouvelles du romosozumab

Les résultats des études d’histomorphométrie précliniques étaient déjà publiés. Les données chez l’homme ont été présentées et confirment le mode d’action particulier de cette molécule, activant la formation osseuse par une augmentation du «modelage»- sans résorption initiale- aux surfaces endocorticales et trabéculaires.

L’étude post-hoc d’ARCH montre que par rapport à l’alendronate, le romosozumab (Rmab) est supérieur pour augmenter la DMO volumique et la résistance osseuse estimée par analyse en éléments finis, ce qui est cohérent avec les résultats de supériorité clinique déjà publiés. Les données d’expression de la sclérostine dans les artères athéromateuses chez l’homme et les effets vasculaires de l’inhibition de la sclérostine dans deux modèles murins d’athérosclérose sont rassurantes. Cette molécule déjà sur le marché au Japon, aux USA ou en Australie et tout juste approuvée par l’agence européenne du médicament (EMA) fera toutefois l’objet d’une surveillance post-commercialisation rapprochée.

Dr Maia Bovard Gouffrant

Source : lequotidiendumedecin.fr