La rhumatologie française en mouvement pour les 50 ans de la SFR

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Publié le 20/12/2019
La 32 e édition du congrès fêtait aussi les 50 ans de la Société française de rhumatologie (SFR). Parmi les nombreuses sessions, focus sur les recommandations et l’analyse des grandes cohortes françaises en rhumatologie, avec en particulier des données rassurantes sur le risque de cancer lié aux biothérapies et de pneumopathie interstitielle avec le méthotrexate.

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Concernant l’ostéoporose, on constate un recul des traitements lié à l’influence négative de certaines alarmes. Comme l'a rappelé d'une part le Pr Christian Roux, une femme sur cinq et un homme sur trois meurent dans l’année qui suit une fracture du col du fémur, selon les données de la DREES du ministère de la Santé. Mais d'autre part, les chiffres sont rassurants concernant le risque d’évènements indésirables et en particulier d’ostéonécrose : chez 60 000 patients traités pendant 7 ans, l’incidence a été de 2,5 pour 10 000 patients année ; le risque chez les patientes ostéoporotiques non traitées était de 1,13 pour 10 000 patients années.

Des recommandations actuelles ou futures

Les nouvelles recommandations de la SFR sur la prise en charge de la goutte se veulent extrêmement pratiques et didactiques. Élaborées par un collège d’experts comprenant des rhumatologues, des médecins généralistes (MG), des cardiologues et un patient, elles concernent à la fois le traitement de la crise et la prise en charge au long cours, en insistant tout particulièrement sur le rôle de l’éducation thérapeutique. On attend de ces recommandations une meilleure compréhension de cette pathologie très douloureuse, qui reste encore négligée.

Les recommandations de la HAS sur la prise en charge de la lombalgie commune ont aussi été développées et validées.

Un autre travail pourrait déboucher sur de nouvelles recommandations concernant les arthrites septiques. Les données colligées dans 127 centres hospitaliers français mettent en lumière une grande hétérogénéité dans les pratiques, avec des antibiothérapies et des durées d’hospitalisation prolongées alors que les recommandations des infectiologues tendraient plutôt à les raccourcir, mais on n'en connaît pas encore la pertinence chez des patients atteints souvent de nombreuses comorbidités et ayant une importante morbimortalité.

Polyarthrite rhumatoïde : traiter plus tôt

L’analyse des données de la cohorte ESPOIR a clairement mis en évidence que le retard à la mise en route d’un traitement de fond, s’accompagne d’une progression plus rapide de la polyarthrite rhumatoïde (PR) et d’une altération fonctionnelle plus importante, avec plus d’érosions articulaires. Les patients chez qui le méthotrexate (MTX) a été instauré de façon retardée, ont pour la plupart reçu des corticoïdes en traitement de la crise. « Il faut donc une vraie collaboration MG/rhumatologues pour référer le malade au plus vite au rhumatologue et que le traitement de fond puisse être instauré dans les 3 mois », alerte le Dr Christophe Hudry, rhumatologue à l'hôpital Cochin et vice-président de la SFR.

Spondyloarthrites, des profils différents

La cohorte DESIR apporte des enseignements précieux dans le domaine de l’imagerie et/ou de la clinique dans les spondyloarthrites. On constate qu’émergent deux profils de patients, les clusters A, avec une forme axiale pure et une atteinte radiographique, et les clusters de B, avec une atteinte axiale et périphérique. Ces derniers présentent moins de lésions radiologiques mais ont des scores de douleur et de gêne fonctionnelle plus élevés, avec un profil différent qui pourrait peut-être requérir d’autres cibles thérapeutiques. 

Des données rassurantes sur les biothérapies et le méthotrexate

« Une des communications majeures du congrès montre que la prescription de MTX non seulement n’entraîne pas de pneumopathie interstitielle mais aurait plutôt un effet protecteur ce qui aura un impact essentiel pour nos pratiques », précise le spécialiste.

Un travail mené à partir de la base de données de l’assurance-maladie (SNDS) ne retrouve pas d’augmentation du risque de cancers solides, ni de lymphome dans les PR traitées par biothérapies et ne constate pas non plus de différentes entre les différentes biothérapies. 

Toujours le microbiote…

« La Dr Marie Kostine a conduit une étude de cohorte rétrospective montrant que chez les patients traités en cancérologie par les inhibiteurs de checkpoint, la prescription d’antibiotiques, de corticoïdes (> 10 mg/j), d’IPP ou de psychotropes altère de façon significative la réponse anticancéreuse. Le mécanisme étant une modification du microbiote intestinal », souligne le Dr Hudry.

D’après un entretien avec le Dr Christophe Hudry, Hôpital Cochin, Vice-président de la SFR   
- Roux C. L'ostéoporose en 2019
- Etude d’impact des comédications fréquemment utilisées en rhumatologie sur l’efficacité des immunothérapies anticancéreuses
- Bardin T. Recommandation de la SFR sur le traitement de la goutte
- Bailly F. Développement et validation des recommandations HAS 2019 sur la prise en charge du patient présentant une lombalgie commune
- Richebé P. Description et prise en charge des arthrites septiques dans les services de rhumatologie français : une étude nationale multicentrique rétrospective entre 2016 et 2017 (étude Pégase)
- Kedra J. Impact des traitements sur la progression radiologique à 10 ans au cours de la polyarthrite rhumatoïde : données de la cohorte ESPOIR
- Costantino F. Les phénotypes de spondyloarthrite définis par clustering dans la cohorte DESIR à l’inclusion sont prédictifs de la sévérité de la maladie à 5 ans  
- Seror R. Comparaison du risque de cancer entre les différentes biothérapies de la polyarthrite rhumatoïde en France: étude de cohorte dans le Système National des Données de Santé (SNDS)
- Seror R. Risque de cancer associé aux biothérapies dans la polyarthrite rhumatoïde en France: étude de cohorte dans le Système National des Données de Santé (SNDS) 
- Juge P.-A. Méthotrexate et le risque de pneumopathie interstitielle diffuse associée à la polyarthrite rhumatoïde

Dr Maia Bovard Gouffrant

Source : lequotidiendumedecin.fr