Face au risque fracturaire

Ostéoporose : quand parler d’échec thérapeutique ?

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Publié le 29/03/2024
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La définition de l’échec thérapeutique dans l’ostéoporose reste difficile. Une fracture sous traitement ne constitue pas forcément un échec ; un examen approfondi est nécessaire avant éventuellement, de modifier le traitement.

Crédit photo : SCIENCE SOURCE/PHANIE

L’échec thérapeutique est imparfaitement défini dans l’ostéoporose. « De fait, aucun traitement disponible ne permet d’éliminer complètement le risque fracturaire, en particulier les fractures périphériques, et surtout chez les patientes à haut risque », souligne le Pr Serge Ferrari (Hôpitaux universitaires de Genève, Suisse).

Récurrence de fractures et marqueurs du remodelage osseux

Néanmoins, il a été proposé que l’occurrence d’au moins deux fractures de fragilité sous traitement, pendant au moins deux ans et dans la mesure d’une adhésion thérapeutique avérée (par exemple, avec une réponse adéquate des marqueurs du remodelage osseux) puisse être considérée comme un échec (1).

Une diminution significative de la DMO à deux ans, d’au moins 5 % au rachis ou 4 % à la hanche malgré le traitement (voire moins, par exemple 3 % selon la précision de la machine utilisée), et particulièrement en présence d’une nouvelle fracture, ou en l’absence de réponse des marqueurs de remodelage peut aussi être considérée comme un échec thérapeutique (1).

Pour attester de l’efficacité du traitement, un changement d’au moins 25 % des marqueurs CTX et P1NP est attendu après six mois de traitement, à la baisse ou à la hausse selon que l’on utilise un traitement anti-résorbeur ou ostéo-anabolique. Toutefois, l’étude Trio, comparant divers biphosphonates, a fait apparaître des seuils de changements significatifs pour les marqueurs plus élevés : -60 % pour le CTX et -40 % pour le P1NP (2).

« Lorsque l’adhésion thérapeutique est bonne, l’échec reste toutefois rare, tempère le Pr Ferrari. Il doit faire suspecter une cause secondaire sous-jacente : hyperparathyroïdie, hyperthyroïdie, hypercortisolisme, mastocytose, ostéomalacie, malabsorption, pathologie rénale, myélome ou autres tumeurs. » Il est alors nécessaire de réaliser les examens biologiques appropriés.

Faut-il changer le traitement ?

En cas d’échec avéré, une fois exclus les problèmes d’adhésion et les causes secondaires, un changement thérapeutique peut paraître utile. Néanmoins, il n’est pas si évident lorsqu’une fracture survient en cours de traitement alors que les marqueurs et la DMO ont bien répondu : en effet dans ce cas, il n’existe pas de preuve directe qu’un changement thérapeutique, quel qu’il soit, puisse diminuer le risque fracturaire.

En revanche, en cas de réponse de DMO insuffisante sous biphosphonates, le changement pour du dénosumab peut permettre de regagner de la DMO. Il en est de même pour un changement vers le tériparatide (potentiellement indiqué en cas de survenue de fracture vertébrale), même si le gain de DMO sera limité au rachis, avec une diminution transitoire à la hanche.

La situation est plus compliquée si l’échec thérapeutique est constaté au cours d’un traitement par denosumab, puisque dans ce cas, un switch pour les biphosphonates n’amènera aucune amélioration de DMO, tandis qu’un switch pour le tériparatide entraînera une diminution de la DMO à la hanche.

Dans ce cas, il est donc conseillé de favoriser un traitement combiné, de denosumab ou de bisphosphonate avec le tériparatide.

D’après la communication du Pr Serge Ferrari (Hôpitaux Universitaires de Genève, Suisse) lors de la 37e Journée Scientifique du Grio

(1) Diez-Perez A et al. Treatment failure in osteoporosis. Osteoporos Int. 2012 Dec;23(12):2769-74

(2) Naylor KE et al. Response of bone turover markers to three oral biphosphonates therapies in postmenopausal ostéoporosis : the Trio study. Osteoporos Int. 2016 Jan;27(1):21-31

Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr