Une équipe du service de rhumatologie de l’hôpital Bicêtre (AP-HP), de l’Université Paris-Saclay et de l’Inserm vient de comprendre pourquoi l'efficacité des traitements biologiques contre la polyarthrite rhumatoïde diminue avec le temps : les patients développent une réponse immunitaire à l'encontre de ces molécules. Ses observations sont publiées dans le « Jama Network Open ».
Introduits il y a une vingtaine d'années, les traitements biologiques ont radicalement amélioré le pronostic de cette maladie inflammatoire. Actuellement, on en dénombre dix différents disponibles pour les patients en échec d’un traitement de première ligne par méthotrexate.
Malheureusement, au bout de deux ans, environ la moitié des patients doivent arrêter leur traitement, faute d'efficacité prolongée. Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer pourquoi 40 à 60 % des patients ne poursuivent pas leur traitement. Il a notamment été observé des anticorps dirigés contre les traitements biologiques, mais les données à leur sujet restaient conflictuelles.
C'est pourquoi une étude a été montée dans le cadre du projet Abirisk (Anti-Biopharmaceutical Immunization: Prediction and Analysis of Clinical Relevance to Minimize the Risk), une initiative européenne destinée à étudier spécifiquement les facteurs de risque de réaction immunitaire contre différentes catégories de médicaments.
Abirisk comprend notamment des cohortes prospectives de patients atteints de maladies immunitaires et inflammatoires, dont la la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse. Lors de travaux antérieurs, les chercheurs du projet Abirisk ont montré que les immunosuppresseurs peuvent réduire le risque d'apparition d'anticorps dirigés contre une molécule thérapeutique. De plus, il avait aussi été décrit comment la coadministration de méthotrexate et d'un traitement biologique réduit la quantité d'anticorps dirigés contre ces derniers.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs de l'AP-HP ont étudié les données de 230 patients atteints de polyarthrite rhumatoïde inclus dans 27 centres et quatre pays, entre mars 2014 et juin 2016. Tous ont été traités par anti-TNF (adalimumab, etanercept ou infliximab), rituximab ou tocilizumab.
Des anticorps anti-biomédicaments apparaissent chez 38,2 % des patients traités avec l’anti-TNF, 6,1 % avec l’etanercept, 50 % avec le rituximab et 20 % avec le tocilizumab.
Un impact direct sur la réponse clinique
En analyse multivariée, les chercheurs constatent que les plus fortes concentrations d'anticorps dirigés contre le traitement biologique étaient observées chez les patients chez qui la molécule employée était peu concentrée, laissant suggérer que cette dernière a été éliminée par une réaction immunitaire dirigée contre lui.
Les chercheurs en déduisent que l’apparition d’anticorps anti-biomédicaments peut être une cause fréquente d’épuisement d’effet des traitements biologiques dans la polyarthrite rhumatoïde. Ils suggèrent d’effectuer cette recherche en cas de non-réponse ou d’épuisement de réponse au traitement biologique. En cas de positivité, un autre médicament de la même classe pourra être proposé plutôt que de changer de mode d’action.
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