A l’occasion d’une session dédiée aux douleurs de l’appareil locomateur, la Dr Rose-Marie Javier (Rhumatologue au centre d’étude et de traitement de la douleur (CETD) des hôpitaux universitaires de Strasbourg), a confirmé les liens probables entre carence en vitamine D et douleurs ostéo-articulaires. Si cette relation a été mise en évidence dès 2003 dans une étude américaine réalisée à la Mayo Clinic, depuis bien d'autres travaux cliniques l’ont attesté. Par exemple, une étude entreprise par MZ Erkal en 2006 chez 994 adultes en bonne santé vivant en Allemagne a retrouvé cette corrélation, avec une exposition particulièrement forte aux douleurs ostéoarticulaires généralisées chez les habitants d’origine turque (60 % de fréquence contre 15 % chez les Allemands), lesquels présentaient pour les trois quarts d’entre eux un taux de 25OHD inférieur à 20 ng/ml. Port du voile et grossesses multiples constituaient des facteurs indépendants d’augmentation du risque d’hypovitaminose D dans la population féminine. D’autres études ont décrit une relation entre carence en vitamine D et consommation de morphine pour des douleurs chroniques, consultation du médecin généraliste pour des céphalées, ou plus récemment en 2023 intensité des douleurs et qualité de vie chez les hémodialysés (1).
La supplémentation bénéfique sur la douleur ?
Sur cet aspect, toutes les études de supplémentation ne sont pas positives. Malgré tout, une étude entreprise chez l’animal, publiée en 2023, a conclu à une réduction de la destruction du cartilage du genou arthrosique et des douleurs associées par inhibition de l’expression des métalloprotéases après administration de vitamine D (2). Dans l’espèce humaine, des essais cliniques ont décrit, après supplémentation, une diminution des douleurs de cuisse, ou des céphalées, une réduction des douleurs musculosquelettiques liées aux anti-aromatases, notamment chez les femmes carencées en vitamine D, une diminution des doses d’opioïdes et de la fatigue par rapport au placebo en soins palliatifs, enfin, une amélioration dans certains essais des symptômes fibromyalgiques.
Différents effets extra-osseux
Comme l’a par ailleurs rappelé le Dr Javier, hors ses effets sur l’os, le muscle et le cartilage, des actions anti-inflammatoire et de régulation de l’auto-immunité sont suspectées pour la vitamine D et elle pourrait avoir une action centrale cérébrale, car des récepteurs sont présents sur les neurones et les cellules gliales et elle stimule la formation de facteurs neurotrophiques. Plus généralement, les effets de la vitamine D sont non génomiques par maintien d’une calcémie normale, indispensable pour l’activité de la majorité des cellules, et génomiques par action sur de nombreux gènes grâce à ses récepteurs nucléaires. Des modifications de l’expression par la vitamine D de 229 gènes, dont certains associés au diabète de type 1, à la maladie de Crohn, au lupus érythémateux disséminé, à la polyarthrite rhumatoïde, à la sclérose en plaques, au cancer du côlon, mais aussi à la croissance de la taille et à la couleur des cheveux, ont ainsi été mises en évidence.
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