Infections à Pseudomonas aeruginosa

De nouvelles associations d’antibiotiques efficaces contre les bactéries résistantes

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Publié le 20/06/2019
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bactéries résistantes

bactéries résistantes
Crédit photo : Phanie

« Pseudomonas aeruginosa est une bactérie naturellement résistante à de nombreux antibiotiques, souligne le Pr Patrick Plésiat, professeur de bactériologie au CHU de Besançon. Les antibiotiques efficaces contre cette bactérie sont quelques bêtalactamines, comme la pipéracilline en association ou non avec le tazobactam, la ceftazidime seule ou en association avec l'avibactam, le ceftolozane-tazobactam, le céfépime, l'imipénème, le méropénème. Il existe aussi deux aminosides efficaces, la tobramycine et l'amikacine, une fluoroquinolone, la ciprofloxacine, et également la colistine », énumère-t-il.

1 % de souches résistantes à tous les antibiotiques

D'après une étude de l'EARS-Net, la résistance à l'imipénème est stable depuis 2015 et les bactéries résistantes à 5 groupes d'antibiotiques sont également stables, autour de 12 %. Le taux de résistance de P. aeruginosa aux carbapénèmes peut quant à lui atteindre 25 à 30 %. En revanche, une étude REA-Raisin de 2016 montre que les souches résistantes à pratiquement tous les antibiotiques n'excèdent pas 1 %. « Nous avons affaire à des souches qui sont globalement standard sur le plan de l'antibiogramme, avec parfois des clones épidémiques qui accumulent des mécanismes de résistance compliqués, remarque le Pr Plésiat. Ce qui pose problème, ce sont les souches XDR (ultrarésistantes aux antibiotiques). En revanche, les souches PDR, c'est-à-dire résistantes à tous les antibiotiques, sont relativement rares. Elles ne représentent que 0,2 % des souches analysées par le Centre national de référence de la résistance aux antibiotiques (CNR) du CHU de Besançon ».

Émergence des mutants résistants

Deux nouvelles associations récemment mises sur le marché ont montré leur efficacité contre les souches de P. aeruginosa multirésistantes : il s'agit de ceftazidime/avibactam (CZA) et ceftolozane/tazobactam (C/T). « Elles ont pour point commun d'avoir des spectres anti-Gram négatif proches, ainsi qu'une activité sur les mutants hyperproducteurs de céphalosporinase (AmpC). En revanche, elles n'ont pas d'activité sur les bactéries productrices de métallo-bêta-lactamase (MBL). Leurs différences concernent notamment l'activité de l'avibactam sur les bêtalactamases à spectre élargi (BLSE) et carbapénémases de classe A des entérobactéries, tandis que l'association C/T a une concentration minimale inhibitrice (CMI) plus basse sur les mutants hyperproducteurs de céphalosporinase », détaille le Pr Plésiat. Pour lui, ces associations sont intéressantes dans le traitement des infections à P. aeruginosa multirésistants, mais il convient cependant de « surveiller l'émergence de mutants résistants sous traitement ». Un avis partagé par le Dr Rozenn Le Berre, infectiologue à Brest, qui ajoute que « l'association ceftazidime-avibactam a une AMM pour les pneumonies nosocomiales, tandis que le ceftolozane/tazobactam ne l'a pas encore ». Ainsi, le ceftolozane/tazobactam a l'AMM dans le traitement des infections intra abdominales compliquées, des pyélonéphrites aiguës et des infections urinaires compliquées. L'association ceftazidime/avibactam a quant à elle l'AMM dans le traitement des infections intra-abdominales compliquées, des infections urinaires compliquées dont les pyélonéphrites aiguës, des pneumonies nosocomiales dont les pneumonies acquises sous ventilation mécanique et des infections dues à des bactéries aérobies à Gram négatif chez des adultes pour qui les options thérapeutiques sont limitées.

Le Dr Le Berre souligne que « la durée de traitement par antibiotiques ne doit pas être prolongée au-delà de 7 jours, sauf peut-être pour les patients atteints de mucoviscidose, pour lesquels une étude est en cours sur le sujet ». Il mentionne également les perspectives de traitements, en particuliers non antibiotiques, comme les inhibiteurs des pompes à efflux ou les bactériophages.

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin: 9759