Cancer de la prostate à bas risque

Faut-il traiter et comment ?

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Publié le 15/01/2018
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La classification du cancer de la prostate en haut risque, risque intermédiaire et bas risque est basée sur les critères de D’Amico qui comprennent le stade clinique, la valeur du PSA et le grade histologique.

Diagnostiquer les cancers à faible risque 

Le faible risque est défini par un stade clinique inférieur à T3 (tumeur strictement intraprostatique), une valeur du PSA inférieur à 10 ng/ml et un score de Gleason inférieur à 7. Aujourd’hui ces trois paramètres paraissent insuffisants pour définir la meilleure stratégie thérapeutique face à ces tumeurs ayant un potentiel évolutif différent. En pratique, d’autres éléments sont à prendre en compte pour affiner le diagnostic : le pourcentage de biopsie envahi par le cancer, la longueur du tissu cancéreux sur les carottes, la densité du PSA et surtout l’aspect de la prostate en IRM sont maintenant des éléments examinés en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) pour définir la probabilité d’évolution de ce cancer. Le statut gonadique (testostéronémie) peut également être pris en compte en admettant que l’hypogonadisme est un facteur prédictif d’agressivité tumorale. Ainsi avec l’ensemble de ces paramètres, il est possible de définir des cancers à faible risque.

Surveillance ou traitement curatif ?

Une fois le diagnostic de cancer de faible risque établi, il est possible de discuter 5 possibilités de prise en charge : la surveillance active, la curiethérapie, la radiothérapie externe, l’HIFU (ondes focalisées de haute intensité) ou la prostatectomie totale. Les traitements focaux sont toujours en cours d’évaluation et ne font actuellement pas partie des recommandations. Si les alternatives thérapeutiques sont discutées en RCP, le choix final doit se faire avec le patient après avoir fourni une information claire. En effet, l’âge physiologique du patient, son état d’anxiété face au diagnostic de cancer, ses projets de vie, l’importance qu’il porte à la sexualité active sont autant de facteurs qui peuvent influencer le choix final.

La surveillance active s’impose de plus en plus quand la masse tumorale sur les biopsies et sur l’IRM est faible (microfoyer de moins de 3 mm de longueur), que le PSA est inférieur à 6 ng/ml et que le patient accepte le protocole de surveillance. Celui-ci impose un suivi strict avec des dosages de PSA trimestriels puis annuels et surtout la réalisation de nouvelles biopsies de contrôle à la date anniversaire des premières.

Si un traitement à visée curative est choisi, il est important d’évaluer le risque de morbidité. Quel que soit ce traitement (Prostatectomie, HIFU, Curiethérapie ou radiothérapie externe), il expose à de potentiels troubles mictionnels (dysurie, urgenturie pour la radiothérapie, incontinence pour la chirurgie) et des troubles de l’érection. Pour ces patients atteints d’un adénocarcinome de faible risque, il est alors important d’étudier les possibilités de préserver ces deux fonctions (urinaire et sexuel). L’anatomie de la prostate et la localisation de la tumeur (ou des tumeurs si multifocal) sont alors très importantes à prendre en considération. Les progrès techniques permettent en effet d’affiner la cible du traitement. En chirurgie, la préservation des bandelettes vasculonerveuses quand elle est carcinologiquement justifiée et la dissection intrafaciale permettent de maintenir la qualité des érections dans la plupart des cas. L’HIFU peut également épargner la sexualité en focalisant les ondes sur le parenchyme à distance des ailerons prostatiques. La curiethérapie est moins précise car le positionnement des grains d’iode n’a pas cette précision anatomique alors que les progrès de la radiothérapie externe permettent d’espérer une amélioration de la morbidité régionale (rectum et nerfs érecteurs).

La prise en charge des cancers de la prostate à faible risque comportant une prise de risque, le dialogue et la franchise entre l’urologue et son patient sont donc fondamentaux pour l'optimiser.

Chef du service d'urologie à l'hôpital Foch, université Versailles St Quentin, et président de l’Association française d’urologie

Pr Thierry Lebret

Source : Bilan Spécialiste