Prise en charge de l’insuffisance rénale

La FHP-dialyse en mal de concertation

Publié le 16/06/2011
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DÉNONÇANT ce qu’il considère comme « les dérives de l’actuelle politique d’incitation tarifaire privilégiant la dialyse hors centre », Gilles Schutz, le président de la FHP-dialyse (qui regroupe 120 établissements privés), s’inquiète des conditions de prise en charge de l’insuffisance rénale chronique à l’horizon 2022.

Cette pathologie concerne aujourd’hui entre 1,7 et 2,5 millions de patients – dont environ 70 500 seraient atteints d’insuffisance rénale chronique terminale. « Avec le vieillissement de la population, le nombre de ces patients augmente de 3 % par an et nous ne pouvons plus conduire nos établissements dans une prise en charge à l’aveugle, en attendant que des décisions soient prises », affirme Gilles Schutz. Gilles Schutz se soucie tout particulièrement du sort des 10 000 patients nouveaux à traiter dans les dix années a venir, sachant qu’un malade sur deux entrant en dialyse a d’ores et déjà plus de 70 ans.

Le patron de la FHP-dialyse qualifie par ailleurs de « mesures idiotes » les restrictions désormais imposées aux malades en matière de transport : « Depuis cette année, les trajets en voiture individuelle ne sont plus pris en charge par l’assurance-maladie qui impose aux médecins de prescrire des taxis conventionnés qui coûtent paradoxalement plus cher. » Pourtant, il lui semble évident que des solutions existent (au-delà des orientations médico-économiques) et qu’elles passent notamment par une réorganisation de la dialyse en France, dossier sur lequel les centres privés n’auraient pas été invités à s’exprimer. « La récente baisse des tarifs de l’hémodialyse en centre, qui aligne les tarifs du secteur privé sur ceux du secteur public, est une mesure autoritaire que nous n’avons pas pu discuter alors que le secteur privé réalise en France une hémodialyse sur trois », déplore par exemple Gilles Schutz.

Christian Jacquelinet, qui gère le registre des insuffisances rénales et la filière dialyse-greffe à l’agence de biomédecine va plus loin. « Il est temps de mettre en place une vision intégrée, une approche néphrologique globale qui impose que l’on puisse discuter de manière collégiale des différentes réalités de traitement », déclare-t-il avant de soulever un problème encore plus délicat. En début d’année, 8 270 personnes étaient inscrites sur une liste d’attente de greffe rénale, un dispositif souffrant, pour Christian Jacquelinet, d’un excès de censure. « En réalité, la pénurie d’organes amène à exclure des patients – sur des critères d’âge ou parce qu’ils souffrent de diabète – sans contre-indication formelle, alors que ceux-ci pourraient bénéficier de greffe. » Il invite à sortir de cette logique en utilisant les plans de gestion de risque élaborés par les agences régionales de santé. S’adapter aux besoins passe selon lui par « la révision d’un système qui freine la transplantation ». Contrairement au cœur ou au poumon, la recherche d’un rein est avant tout interrégionale, seul un des deux reins prélevés est proposé au niveau national. Élargir ce périmètre multiplierait donc les chances des patients. Le suivi de ces transplantations pourrait aussi être réalisé par les néphrologues privées. Autant de pistes avancées aujourd’hui par la FHP qui souhaite renouer le dialogue avec les pouvoirs publics et être associée aux décisions qui s’imposent pour améliorer la prise en charge des dialysés.

 LAURENCE MAUDUIT

Source : Le Quotidien du Médecin: 8983