Télémédecine : un marché prometteur qui provoque la ruée des opérateurs

Par
Publié le 17/09/2018
Article réservé aux abonnés

Avec l'entrée de la télémédecine dans le droit commun, des dizaines de sociétés privées s'engouffrent dans ce marché émergent, avant une probable consolidation. 

Deux modèles principaux se distinguent. Le premier recouvre les plateformes commerciales de télémédecine qui proposent généralement des téléconsultations 24H/24, ponctuelles, avec des médecins salariés ou non. La CNAM rappelle que les prestations sans orientation initiale par le médecin traitant ni suivi global, considérées comme « hors du parcours de soins », ne seront pas prises en charge dans le droit commun. En revanche, plusieurs complémentaires santé (des mutuelles et assureurs dont le pionnier AXA) remboursent ces services pour leurs adhérents.

Le deuxième modèle regroupe les opérateurs qui proposent (ou promettent) d'équiper les médecins en solutions techniques pour réaliser la téléconsultation dans le cadre de l'avenant 6. De la start-up aux éditeurs de logiciels, les fournisseurs doivent respecter les prérequis techniques et réglementaires – dont la sécurisation de l'hébergement et de l'échange de données personnelles de santé. 

D'autres modèles existent comme la cabine médicale – truffée d'instruments de mesure connectés – développée depuis plusieurs années par la société H4D fondée par le Dr Franck Baudino. Et dans plusieurs communes rurales du Loiret, les élus locaux ont décidé de miser sur des cabinets de téléconsultation développés par la start-up HealPhi en partenariat avec Cegedim pour les aspects techniques.

Dans un marché hyperconcurrentiel, chaque société espère se différencier en proposant une solution complète « tout-en-un » ou des services particuliers payants, à des tarifs très variables. « Il n'existe pas encore de liste de l'ensemble des offres existantes », explique la CNAM.  

Temps médical et accès aux spécialistes…  

Chez la start-up française Feelae, qui vient de lancer sa solution Leah, on met en avant l'interopérabilité entre la plateforme et le logiciel de gestion du cabinet pour proposer des rendez-vous médicaux par visioconférence. « D’ici à deux ans, on aimerait toucher 15 % de part de marché, annonce le Dr Grégoire Versmée, co-fondateur. Sur 116 000 médecins libéraux, on souhaite équiper 20 000 médecins ». Medaviz, autre solution de visioconférence sécurisée, vise 10 000 médecins libéraux d'ici à trois ans. 

La start-up Qare (testée dès 2017 pour les Français résidant à Londres) vante son « module d'adressage à un spécialiste prévu dans l'outil ainsi qu'une formation des téléconsultants ». Le Dr Alexandre Maisonneuve, co-fondateur, espère équiper 5 000 médecins libéraux d'ici fin 2019. De son côté, la plateforme Medvu met en avant le gain de temps médical pour le praticien libéral (« 20 à 50 % selon son exercice ou sa spécialité ») et la fluidification du parcours à tous les étages – en commençant par la réservation en ligne de son propre médecin.

D'autres acteurs anciennement implantés peaufinent aussi leur stratégie comme le poids lourd MédecinDirect qui compte lancer son offre de téléconsultation aux médecins libéraux courant octobre.  

Autre exemple : Idomed, start-up créée en 2016, qui se distingue en proposant sa solution aux médecins et infirmiers des maisons de santé. « On met à leur disposition une tablette et un stéthoscope connectés. L'équipe travaille en coordination. L'infirmière se déplace et accompagne le patient pour réaliser la téléconsultation avec le médecin traitant de la MSP. Ce kit est vendu 390 euros par mois pour toute la maison de santé », explique Vincent Lambert, cofondateur de la société.

Appétit

L’ouverture du marché aiguise l'appétit des sociétés étrangères. Docly, filiale de Min Doktor, une société suédoise, démarque en équipant une vingtaine de généralistes regroupés en MSP en Rhône-Alpes et en PACA. Sa marque de fabrique : un tri par questionnaire structuré en amont pour permettre aux médecins de ne pas perdre de temps. « Le patient doit répondre à une série de questions pour savoir si le cas relève de la téléconsultation ou requiert une consultation présentiel », détaille Lionel Hoellinger, directeur de Docly France. Livi, géant suédois créé en 2015 (sous la marque KRY), arrive aussi dans l'Hexagone et revendique 500 000 téléconsultations déjà dans quatre pays d’Europe…  

Il est préférable de tester les solutions avant de signer tout contrat. Pour le Dr Jacques Lucas, délégué général au numérique à l'Ordre national, « le médecin doit s'assurer que les canaux de transfert sont sécurisés, de la continuité du service et d'un service après vente efficace »

Loan Tranthimy

Source : Le Quotidien du médecin: 9686