« NOTRE DERNIER acheminement de traitements remonte à décembre dernier. Depuis deux semaines, nous ne pouvons plus rien envoyer et les stocks dans les zones occupées vont s’épuiser », s’inquiète Stéphane Besançon, directeur général de l’organisation non-gouvernementale Santé Diabète. La guerre ouverte vient de porter un ultime coup à la déstructuration du système de soins pour le diabète. Un drame pour les milliers de diabétiques. En temps normal, cette maladie non-transmissible est souvent oubliée, car considérée - à tort - comme propre aux pays riches, malgré une prévalence de 3,3 % de diabète de type 2 chez les 20-79 ans au Mali. En temps de guerre, les diabétiques doivent en outre craindre les ruptures de traitement.
Longue déstabilisation.
Les difficultés ne datent pas de l’intervention militaire française. Depuis l’occupation du nord par les groupes armés islamistes, en avril 2012, les infrastructures sanitaires ont été saccagées, notamment à Gao, les pharmacies, pillées. À Douentza et à Tombouctou, les 3 médecins référents pour le diabète quittent la zone. Mais grâce à un décret du ministère de la Santé, autorisant un approvisionnement humanitaire et gratuit, les traitements parviennent aux malades, via les ONG internationales, les associations de patients, et l’État.
Les personnes déplacées parviennent à rejoindre la capitale Bamako. Fin décembre, Santé Diabète recense une quarantaine de diabétiques venus du Nord à Bamako, dont 3 enfants souffrant de diabète de type 1.
Mais depuis janvier, la confusion règne. Au nord, l’espoir ne peut venir que du repositionnement des ONG urgentistes, susceptibles d’apporter les médicaments, en fonction de l’évolution du conflit. Seul le personnel médical natif des régions occupées est demeuré sur place. Plusieurs zones comme Mopti, proche de Konna, la porte vers le Sud, ou Diabali, plus à l’Ouest, sont dans des situations floues, fluctuantes au grès des lignes de front.
« Aujourd’hui, nous ne pouvons pas savoir combien de personnes sont en détresse au Nord. En juin à Mopti, j’ai constaté des cas de diabètes dans les camps de déplacés. Mais ces dernières semaines, nous avons peu d’informations », explique le Dr Ibrahim Nientao, médecin endocrinologue à l’Hôpital du Mali (Bamako). « Un médecin référent diabète est à Mopti, mais il risque d’être occupé par les blessés de guerre », poursuit-il.
Le Sud dans l’attente.
Si la guerre touche directement le Nord, la crise se ressent sur l’ensemble du territoire. Secouée par la répétition des conflits, la Pharmacie populaire du Mali, chargée d’acheter les médicaments sur les marchés internationaux, affronte des problèmes liés aux événements. Actuellement, il n’y a plus une boîte d’antidiabétique oral metformine dans le stock central. Il reste 1 100 cachets de glibenclamide dans tout le pays. « Nous n’avons plus d’insuline mixte. L’insuline pour les enfants pourrait aussi manquer d’ici 15 jours », constate le Pr Assa Sidibe, chef du service d’endocrinologie à l’Hôpital national du Mali. Mais elle relativise : « Pour l’instant, pas un collègue dans tout le CHU m’a dit qu’il ne pouvait pas dispenser les traitements faute de la molécule nécessaire. »
À Bamako, les personnes déplacées sont de plus en plus nombreuses. « Nous avons pris en charge au moins une vingtaine de patients du Nord, venus dans leur famille. Beaucoup présentent un déséquilibre glycémique », constate le Pr Sidibe. « Nous observons énormément de pieds diabétiques, car les traitements ne peuvent être suivis, sans compter le stress généré par la situation », poursuit la médecin, qui a compté 4 à 5 amputations dans la semaine du 14 au 20 janvier.
Pour l’heure, les médecins du Sud, appuyés par ceux du nord qui ont fui les zones de combat, parviennent à contrôler la situation. L’ONG Santé Diabète Mali se tient prête à fournir les molécules nécessaires aux ONG urgentistes pour les zones nord, à envoyer des kits d’urgence et des kits pieds à Mopti et à l’hôpital du Mali tout en poursuivant la prise en charge gratuite des patients déplacés. Mais trouver des donateurs ou de l’argent devient urgent.
*Santé Diabète se mobilise pour chercher des médicaments et des ressources. Pour l’aider : www.santediabete.org ou contact@santediabete.org
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