Une nouvelle épidémiologie
Depuis la généralisation de la vaccination contre la coqueluche, l’épidémiologie de la maladie a changé. Ainsi, la coqueluche reste une maladie infantile, mais elle concerne également l’adulte. Elle se transmet en effet non pas d’enfant à enfant, mais dorénavant d’adulte - adolescent à nourrisson. Cela a particulièrement bien été démontré par une étude de l’« Infant Pertussis Study Group » (1). Dans ce travail qui a porté sur 91 nourrissons de moins de 6 mois ayant une coqueluche, les nouveau-nés avaient été contaminés plus de 8 fois sur 10 par un membre du foyer. De plus, pour l’essentiel, ces membres du foyer étaient des adolescents ou des adultes de moins de 40 ans, principalement des parents.
Cette modification de la transmission de la coqueluche se matérialise par une modification de l’épidémiologie : la coqueluche n’est plus une maladie de l’enfant mais du petit nourrisson de moins de 6 mois, âge où la coqueluche est plus grave. Ainsi, l’incidence chez le nourrisson de moins de 6 mois est de plus de 270/100 000 et entre 1996 et 2005, 1 598 nourrissons de moins de 6 mois ont été hospitalisés, dont 17 % en réanimation, et 32 décès, pour l’essentiel chez des moins de 3 mois, ont été dénombrés (2). Là encore, la contamination avait été le fait d’un parent plus d’une fois sur deux, d’un membre de la fratrie une fois sur 4.
Au terme de ce bilan réalisé par I. Bonmarin et coll., depuis dix ans, deux pics d’incidence ont été observés en 1997 et en 2000, suivis d’une augmentation continue du nombre de cas après deux années de baisse en 2001 et 2002. Les auteurs soulignent que « la proportion des enfants de moins de trois mois a augmenté de 33 % en 1996 à 50 % en 2005 ». L’incidence de la coqueluche chez les moins de 2 mois est estimée à 276 pour 100 000 en moyenne, un taux « particulièrement élevé » si l’on considère celui de 107/100 000 observé aux États-Unis dans les années 1990.
Schéma vaccinal
Pourtant, le vaccin est recommandé depuis 1959. Le schéma vaccinal prévoit 3 doses administrées à 2, 3 et 4 mois et un rappel la deuxième année. Le rappel à l’âge de 11 à 13 ans a été introduit en 1998. La vaccination de l’adulte a été introduite en 2004. La stratégie dite du « cocooning » vise à vacciner les couples ayant un projet parental, mais aussi l’entourage pendant la grossesse, la mère après l’accouchement et les professionnels de santé en contact avec des nourrissons de moins de 6 mois.
Malheureusement, les recommandations relatives aux rappels chez l’enfant de 11 à 13 ans ne sont pas appliquées (3). Ainsi, 57 % seulement des enfants ont reçu 5 doses à 11-13 ans et 40 % ont reçu cette cinquième dose à 5-6 ans et au total, à 18 ans, 34 % seulement des adolescents sont protégés contre la coqueluche. Par ailleurs, la stratégie du « cocooning », qui cherche à protéger les nourrissons trop jeunes pour être vaccinés en vaccinant leur entourage, notamment les parents, qui sont contaminateurs dans 53 % des cas, n’est pas appliquée non plus (4).
Nouvelles recommandations
Les recommandations insistent sur la vaccination des adultes.
De nouvelles recommandations ont été émises dans le cadre d’un avis du Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) en mars 2008. Le HCSP rappelle que dans le schéma français de vaccination contre la coqueluche, la pratique d’un rappel à l’âge de 5 à 6 ans n’est pas recommandée. Les données épidémiologiques ne justifient pas cette pratique. Par ailleurs, la répétition des doses de vaccin coquelucheux acellulaire expose à une exacerbation des effets secondaires locaux. Il insiste sur l’importance de la recommandation d’un rappel coquelucheux entre 11 et 13 ans chez tous les adolescents. Pour les enfants qui ont échappé à ce rappel, un rattrapage par l’administration d’un vaccin dTcaPolio à l’âge de 16 à 18 ans est recommandé. Pour les enfants qui ont reçu un rappel coquelucheux à l’âge de 5-6 ans, le rappel coquelucheux de 11 à 13 ans devrait être différé. Un vaccin dTcaPolio devrait être proposé entre 16 et 18 ans.
Par ailleurs, l’avis insiste sur l’importance de la recommandation d’une vaccination des adultes ayant un projet parental avec le vaccin dTcaPolio. La mise à jour des vaccinations des membres de l’entourage est recommandée à l’occasion d’une grossesse. Cela concerne les enfants non à jour pour cette vaccination et les adultes n’ayant pas reçu de vaccination contre la coqueluche au cours des dix dernières années.
L’avis recommande également la pratique d’un rattrapage coquelucheux chez l’adulte n’ayant pas reçu de vaccination contre la coqueluche au cours des dix dernières années. Un délai minimal de 2 ans est requis entre la vaccination dTcaPolio et une vaccination comportant les valences d et/ou T.
La vaccination de l’ensemble des personnels soignants à l’occasion d’un rappel décennal est également préconisée, ainsi que le rattrapage des professionnels soignants et de la petite enfance en contact avec des nourrissons trop jeunes pour avoir reçu trois doses de vaccin coquelucheux. Il n'y a enfin pas lieu d'administrer plus d'une dose de vaccin dTcaPolio chez l'adulte.
Ainsi, la coqueluche, « ancienne maladie », reste « à l’ordre du jour » (5). Cette situation implique une politique de communication et de diffusion de l’information auprès du personnel médical en charge de la vaccination ainsi qu’auprès du public.
D’après un entretien avec le Pr Daniel Floret (Hôpital Femme-Mère-Enfant, université Claude Bernard Lyon-1, Bron, président du Comité technique des vaccinations)
Références
(1) Wendelboe AM, et coll. ; Infant Pertussis Study Group. Transmission of Bordetella pertussis to young infants. Pediatr Infect Dis J 2 007 ; 26 (4) : 293-9.
(2) Bonmarin I, et coll. Pertussis surveillance in hospitals : a 10 years experience. Euro Surveill 2007 ; 12 : 1201-7.
(3) Antona D, et coll. Couverture vaccinale des enfants et des adolescents en France. Re_sultats des enquêtes menées en milieu scolaire 2001-2004. Bull Epidemiol Hebd 2 007 ; 6 h 45-50.
(4) de La Rocque F, et coll. Enquête sur le statut vaccinal des parents de jeunes nourrissons. Arch Pediatr 2 007 ; 14 (12) : 1 472-6.
(5) Pertussis : an old disease in new clothes. Euro Surveill 2 007 ; 12 : 727.
Conflit d’intérêt : le Pr Floret déclare avoir participé (sans rémunération personnelle) à l’enquête du Pertussis Study Group financée par Sanofi-Pasteur-MSD
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