Les nouvelles voies thérapeutiques de l’édition génomique

Cellectis « dresse » des cellules pour combattre les cancers

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Publié le 09/10/2017
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L’édition génomique permet de modifier le génome grâce à des enzymes qui jouent le rôle de ciseaux moléculaires. La technique repose sur un principe de base de cryptologie en découpant le génome de sorte de reconnaître une séquence longue dans l’ADN, sans risque d’altération. « C’est comme un mot de passe, plus il est long plus il est difficile à cracker », résume André Choulika, pdg de Cellectis.

Quatre techniques offrent aujourd’hui la possibilité de reconnaître des séquences de l’ADN au-delà de 18 lettres : les zinc finger nucléases, les meganucléases, les TALEN® et les CRISPR. Optant pour la technique d’édition du génome TALEN® qui reconnaît 32 lettres, Cellectis a développé son produit candidat UCART123 qui cible la leucémie aiguë myeloblastique (LAM) et la leucémie à cellules dendritiques plasmacytoïdes (LpDC) par la reprogrammation de cellules T allogéniques ingéniérées grâce aux nucléases mises au point par la biotech.

« L’un des enjeux de l’administration de cellules CAR T allogéniques consiste à éviter les réactions de l’hôte contre le greffon ou du greffon contre l’hôte, afin d’empêcher le rejet des cellules administrées aux patients et les dommages infligés aux tissus de l’hôte, et d’obtenir des résultats anti-tumoraux significatifs », souligne Cellectis.

Greffe de cellules

« L’édition de génome permet ainsi d’enlever du génome des cellules T de donneurs sains le gène TCR, de façon à ce que les cellules T ne reconnaissent plus le non soi », explique André Choulika. « On va pouvoir greffer ces cellules de donneurs sains à des patients atteints de leucémie et en même temps dresser ces cellules génétiquement pour qu’elles reconnaissent les cellules cancéreuses du patient. » Reste ensuite à trouver la dose efficace qui varie grandement selon la qualité des cellules du donneur.

C’est tout l’enjeu des différents essais cliniques conduits par la société de biotechnologies. Menés aux Etats-Unis deux récents essais de phase 1 dans la leucémie aiguë myeloblastique (LAM) et la leucémie à cellules dendritiques plasmacytoïdes (LpDC) doivent inclure un total de 9 à 12 patients.

Un protocole amendé pour reprendre les essais suspendus

Suite au décès d’un patient de 78 ans inclus en août dernier dans l’étude LpDC, les deux essais testant le produit candidat UCART123 sont actuellement suspendus par la FDA. Cellectis travaille « en étroite collaboration avec les investigateurs et la FDA afin de reprendre les essais en soumettant un protocole amendé, explorant des doses plus faibles de UCART123 ».

Parmi les autres produits candidats UCART figurant au sein du portfolio de Cellectis, UCART19 testé dans la leucémie lymphoblastique aiguë qui fait l’objet d’un essai clinique pédiatrique et un essai adulte tous deux menés au Royaume-Uni et UCARTCS1 pour lequel un essai clinique devrait débuter en fin d’année prochaine dans le champ du myélome multiple. « UCART représente une révolution dans le domaine de l’immunothérapie. Je pense que cette approche va prendre une très grande part dans la lutte contre le cancer, mais toujours dans le cadre de combinaisons avec d’autres thérapies », conclut André Choulika. 

David Bilhaut

Source : Le Quotidien du médecin: 9608