AMP pour toutes : la justice européenne juge irrecevable sur la forme la plainte de deux Françaises

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Publié le 09/02/2018
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Crédit photo : AFP

La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a jugé ce 8 février irrecevable la requête pour discrimination d'un couple de femmes mariées à qui l'accès à l'assistance médicale à la procréation (AMP) a été refusé par le CHU de Toulouse en décembre 2014. 

Les deux femmes sont mariées depuis le 3 mai 2014. Le 3 décembre 2014, elles adressent au centre d'AMP du CHU de Toulouse une demande d'informations sur les démarches à entreprendre afin d'avoir accès à une AMP, sous la forme d'une insémination avec donneur ou d'une fécondation in vitro. Le 14 décembre, le Dr L. répond qu'il ne peut être donné suite à leur demande, au motif que « la loi de bioéthique actuellement en vigueur en France n'autorise pas la prise en charge des couples homosexuels ». 

Le 7 mai 2015, elles déposent une requête devant la CEDH. Les femmes se plaignent du rejet de leur demande en invoquant l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (doit au respect de la vie privée et familiale) et l'article 14 (interdiction de la discrimination) – car elles dénoncent une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. 

Principe de subsidiarité

Les juges de la CEDH ne se sont pas prononcés sur le fond, mais sur la forme. Ils estiment que les requérantes n'ont pas épuisé tous les recours du droit français pour obtenir l'annulation de la décision du CHU de Toulouse. Ils considèrent qu'elles auraient dû déposer un recours en annulation pour excès de pouvoir devant les juridictions administratives. 

Une hypothèse que les requérantes avaient délibérément évincée, la jugeant inefficace. Une analyse que ne partage pas la CEDH : « Même si les chances de succès étaient éventuellement réduites (...) un recours en annulation pour excès de pouvoir (...) n'aurait pas été "de toute évidence voué à l'échec" ». Surtout, la CEDH renvoie les plaignantes au principe de subsidiarité et à l'obligation d'épuiser préalablement les voies de recours internes, « les mieux placées » pour savoir s'il y a respect ou violation de la vie privée et familiale.

« La Cour a botté en touche, elle a choisi la voie du milieu pour ne pas être taxée de gouvernement des juges », a réagi auprès de l'AFP Me Caroline Mecary, avocate du couple. Selon elle, « il n'y avait aucune chance qu'un recours en annulation devant les juridictions administratives aboutisse ». Et d'ajouter : « C'est un renvoi au législateur national français sur une question de société. » 

« Nous n'avons pas d'autre choix que de nous exiler pour fonder notre famille alors même qu'après l'accouchement, la loi française nous autorise à adopter notre propre enfant (...) Il est temps que la France sorte de cette hypocrisie », a réagi l'une des plaignantes, membre de l'association Les Enfants d'Arc en Ciel, qui milite pour l'accès de toutes à l'AMP. 


Source : lequotidiendumedecin.fr