Une expérience à l’hôpital de Rambouillet

Cuivre contre infections nosocomiales

Publié le 12/10/2011
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Crédit photo : DR

MAINS COURANTES, robinetterie, boutons de porte, interrupteurs, bras de distribution de savon, plateaux roulants : dans les services de pédiatrie et de réanimation du Centre hospitalier de Rambouillet, on teste des alliages en cuivre sur les surfaces de contact sensibles. Soutenu par le Centre d’information du cuivre, laiton et alliages (CICLA), le dispositif, pionnier en France, s’appuie sur les vertus antibactériennes du métal. Le cuivre est le matériau le plus performant pour lutter contre les bactéries.

Dans le service de pédiatrie, les épidémies de bronchiolite et de gastro-entérite arrivent. On surveille la transmission du rotavirus. Le Dr Patrick Pina, chef du service hygiène du centre hospitalier de Rambouillet, explique ces choix stratégiques : « Il faut identifier des endroits à risque d’infections nosocomiales importants. Beaucoup d’enfants porteurs de maladies très contagieuses passent dans le service de pédiatrie. La transmission passe par les mains et l’environnement. Or, il est facile par exemple d’identifier les infections nosocomiales dues au rotavirus. » Pour évaluer l’impact des installations, les règles d’hygiène contre les infections nosocomiales restent strictement identiques, y compris dans le choix des produits désinfectants.

Une réputation ancienne.

Depuis l’antiquité, le métal rouge est réputé pour ses vertus anti-infectieuses. Mais l’histoire du cuivre dans les hôpitaux remonte à 1983. Cette année-là, une étude anglo-saxonne (1) compare la croissance bactérienne sur les poignées de porte des hôpitaux. Au bout de 72 heures, l’activité bactérienne se révèle quasi inexistante sur le laiton (alliance de cuivre), tandis qu’elle est intense sur l’acier. « Le cuivre libère des ions qui provoquent des dommages cellulaires en quelques secondes », explique Olivier Tissot, directeur général du CICLA. Depuis, les vertus antibactériennes du cuivre ont convaincu d’autres hôpitaux, notamment au Chili, au Japon et au Royaume-Uni.

En2007, le centre hospitalier universitaire de Birmingham place dans un service test des éléments à base de cuivre dans des zones sensibles (poignets de porte, robinets, clapets d’obturation...). But de l’étude ? Étudier la capacité du cuivre à éliminer les bactéries. En janvier 2010, le « Journal of Hospital Infection » publie ses résultats : de 90 à 100 % de micro-organismes en moins, tel que le staphylocoque doré résistant à la méthicilline (SDRM) en milieu hospitalier, par rapport aux autres surfaces couvertes de matériaux standards.

Autre argument déterminant pour le cuivre : l’effet antibactérien perdure. Pour des résultats significatifs, la surface doit avoir une teneur en cuivre supérieure à 60 %.

Premiers résultats en 2012..

En France, les infections nosocomiales concernent 750 000 personnes par an et en tuent 3 500. Et nous avons un taux record de résistance aux antibiotiques, avec, par exemple, 28 % pour la méthicilline utilisée contre le staphylocoque doré. « Aujourd’hui, on a des bactéries très tueuses et résistantes et il va falloir innover dans la prévention ! Cela coûte six fois moins cher que les infections » (2), observe Claude Rambaud, présidente de l’association Le Lien, qui accompagne les usagers de la santé victimes d’infections nosocomiales.

Le centre hospitalier de Rambouillet attend une baisse sensible, conforme à une étude menée dans trois hôpitaux américains (3), publiée en juillet 2011, avec 40 % d’infections nosocomiales en moins quand le patient passe 75 % de son temps dans la chambre, si elle est équipée de cuivre sur les surfaces sensibles ; et même une diminution de 69 % quand le lit est également équipé.

Les premiers résultats seront publiés en 2012. S’ils sont concluants, le coût raisonnable de ce dispositif simple (2 500 euros pour environ 400 kg de cuivre sur ce site) pourrait convaincre d’autres hôpitaux français. À quand un plan de prévention des infections nosocomiales par le cuivre ?

(1) « Door Knobs : a source of nosocomial Infection ? », P. J. Kuhn, « Diagnostic Medicine », Nov/dec 1983.

(2) Rapport d’Alain Vasselle sur la politique de lutte contre les infections, 2006.

(3) « Cooper Surfaces in the ICU Reduced the relative Risk of acquiring an Infection While hospitalized », Dr M. G. Schmidt, International cCnference on Prevention anf Infection Control, July 1er st. Innovative approaches to infection control session.

Pour en savoir plus : www.cuivre.org et www.lelien-association.fr.

CHRISTINE COINTE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9023