Le statut en vitamine D des Français

Les déficits modérés sont fréquents

Publié le 24/04/2012
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Crédit photo : S TOUBON

GRÂCE À L’ENQUÊTE nationale nutrition santé (ENNS) réalisée en 2006-2007, les chercheurs de l’équipe de Michel Vernay (Paris 13) ont pu décrire le statut en vitamine D de la population française résidant en France métropolitaine (hors Corse). L’ENNS comprenait notamment un recueil des consommations alimentaires avec un dosage de la 25-hydroxyvitamine D - 25(OH)D -, forme circulante de la vitamine D. Les analyses ont porté sur 1 587 adultes ne prenant pas de traitement médicamenteux à base de vitamine D, en tenant compte de la saisonnalité de l’alimentation et de l’ensoleillement. Les facteurs associés aux risques de déficit « modéré à sévère » (< 20 ng/ml) ou « sévère » (< 10 ng/ml) ont été identifiés par régression logistique multivariée. Les adultes présentant une insuffisance (< 30 ng/ml) étaient 80,1 % dont 42,5 % avec un déficit modéré à sévère et 4,8 % avec un déficit sévère. Le risque de déficit modéré était associé au fait d’être né hors d’Europe, de ne pas partir en vacances, d’avoir un niveau d’activité physique bas, d’être sédentaire et de résider dans une zone à faible ensoleillement. Le risque de déficit sévère, plus limité, était également associé au fait d’être né hors d’Europe, de vivre seul mais était indépendant du niveau d’activité physique et de sédentarité. Ce dernier risque peut s’expliquer par une pigmentation plus élevée de la peau mais aussi par l’existence d’habitudes culturelles, en termes vestimentaire ou de sortie en plein air.

Conditions d’ensoleillement.

Considérant que les besoins quotidiens en vitamine D sont fixés à 10-15 µg et que 50 à 70 % des besoins sont couverts par la production endogène, dépendant des conditions d’ensoleillement, les recommandations préconisent une exposition au soleil du visage et des bras pendant 15 à 30 minutes par jour. Des expositions trop fréquentes ou intenses constituent toutefois un facteur de risque de cancer de la peau. Par ailleurs, depuis 2001, un arrêté autorise en France l’enrichissement en vitamine D des laits et produits laitiers frais. Toutefois l’étude montre, qu’en France métropolitaine, les conditions d’ensoleillement nécessaires pour la production endogène de vitamine D ne se rencontrent qu’entre les mois de juin et octobre, et uniquement lorsque le soleil est au zénith. « Le reste de l’année, et particulièrement en fin d’hiver, la population est donc potentiellement exposée à un risque accru de déficit », commentent les auteurs de l’étude. « Ce risque est renforcé dans les zones de moindre ensoleillement ». D’autres études concluent aussi dans le sens d’un risque plus élevé de déficit en 25(OH)D chez les fumeurs.

Si le déficit modéré ne s’accompagne généralement pas de signes cliniques d’ostéomalacie, il pourrait cependant constituer un facteur de risque d’anomalies osseuses, d’ostéoporose et de certaines maladies chroniques. La vitamine D pourrait également jouer un rôle protecteur dans l’hypertension artérielle, les maladies cardio-vasculaires, certains cancers et constituer un important modulateur du système immunitaire. Selon les auteurs, une « exposition raisonnable » au soleil dans le cadre d’activité de plein air devrait contribuer à réduire la prévalence des déficits en vitamine D, « au-delà du bénéfice de l’activité physique en termes de prévention de l’obésité, de l’hypertension artérielle et des maladies cardiovasculaires ». Comme en Angleterre ou en Australie (où des recommandations d’exposition sont même déclinées selon la latitude et la saison), des actions d’information ciblées seraient « probablement nécessaires » en France, en rappelant à la fois les risques d’une exposition excessive et les bienfaits d’une exposition raisonnable. L’opportunité d’autres actions de santé publique (enrichissement et supplémentation en vitamine D) est « probablement à discuter », suggèrent les auteurs.

STÉPHANIE HASENDAHL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9118