Les pluies abondantes des derniers jours n’ont fait que dégrader davantage l’état de ce terrain baptisé avec ironie : Arc-en-ciel. Pourtant, point de couleurs ici. À quelques centaines de mètres du centre de la ville de Couëron, à l’ouest de Nantes, c’est la présence de l’usine Arc-en-ciel de traitement des déchets qui vaut à ce terrain nu d’être nommé ainsi. Depuis le 13 novembre dernier, des familles Roms campent dessus, dans la boue, sans eau (sauf à un branchement à même le sol à deux ou trois cents mètres de là), sans toilettes, sans électricité. Bref dans « un état de catastrophe sanitaire », selon les mots de la responsable de l’équipe de Médecins du Monde, Catherine Frapard qui suit ces familles à travers leur rocambolesque périple dans l’agglomération nantaise.
Après avoir dû quitter un autre terrain privé devenu impraticable, situé sur la commune de Saint-Herblain, cent personnes, soit une quarantaine de familles, ont cheminé toute la journée du 13 novembre avant d’arriver sur le terrain Arc-en-ciel. Des photos attestent que certaines caravanes, en très mauvais état, ont même dû être transportées sur des remorques réquisitionnées par la préfecture. Certains bénévoles avancent que c’est la police, sur ordre de la préfecture, qui a « ouvert » le terrain aux familles. C’est dire l’improvisation la plus totale pour gérer, si l’on peut dire, ce sujet devenu un enjeu de politique nationale et locale.
Le Dr Stéphanie Lévêque, membre de l’association Fraternité Coueronnaise, se démène depuis la mi-novembre pour que ces personnes, parmi lesquelles l’on dénombrait 54 enfants, puissent vivre dans des conditions plus dignes. Aujourd’hui, il reste 39 personnes, d’une même famille semble-t-il, dont 17 enfants dont trois nourrissons et cinq de trois à six ans. « Celles qui restent sont les plus vulnérables, dont les caravanes ne peuvent pas supporter un nouveau déplacement », explique-t-elle. Avant d’ajouter : « Nous n’avons aucune réponse, malgré les multiples courriers envoyés au député-maire de Couëron et au préfet. Nous avons le sentiment que leur volonté est de laisser pourrir la situation ». Exemple : une demande de branchement électrique est exprimée depuis le début de l’installation. Réponse : le terrain étant privé, c’est impossible. L’agglomération ne comptant quasiment pas d’espaces aménagés pour accueillir ces familles, que Yannick Voisin, une autre bénévole de l’association locale, estime actuellement à au moins 315 vivant sur 23 terrains sauvages, on mesure l’imbroglio politico-administratif, qui serait organisé selon certaines associations.
Six intoxications au monoxyde de carbone
Résultat : la situation de vie de ces adultes et enfants les met en danger. Dès la mi-novembre, six intoxications au monoxyde de carbone ont été déplorées. En cause, le mode de chauffage bricolé à l’intérieur des caravanes. Dans celle, toute petite, où vit Nicoletta avec ses trois jeunes enfants et son mari, il fait une chaleur étouffante. La cuisson des galettes de farine permet au moins de ne pas avoir froid, malgré les bourrasques et l’humidité qui a tout imprégné depuis ces dernières semaines. Mais, l’installation est très sommaire. En plus d’une éventuelle intoxication, le risque d’un incendie ne peut bien sûr pas être écarté.
« Médecins du Monde a transmis deux notes à l’agence régionale de santé pour alerter de ce qui est une catastrophe sanitaire, mais, là encore, nous n’avons pas de réponse », regrette Catherine Frapard. L’ONG connaît ces familles d’Arc-en-Ciel. Elle en suit certains membres. En tout, elle intervient auprès de 45 familles, soit 300 personnes réparties sur cinq sites, en assurant des consultations de première intention et un travail pour ouvrir des droits. « Notre objectif est de les faire entrer dans le dispositif de droit commun, explique la responsable. Pour nous, il s’agit de personnes en très grande précarité, pas de personnes Roms ! L’approche "ethnique" empêche à bien des égards de trouver des solutions et entretient le discours ambiant. »
Avec de telles conditions de vie, les pathologies dont souffrent ces personnes sont multiples (diabète, problèmes respiratoires, hypertension, maladie infectieuse...) et exigeraient un suivi régulier... et des traitements adaptés. « Nous constatons que malheureusement, quand nous orientons des gens à l’hôpital, il n’y a pas de prise en charge globale, avec des traitements mis en place qui ne correspondent pas au mode de vie », précise Catherine Frappard.
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce
La prescription d’antibiotiques en ville se stabilise
Le Parlement adopte une loi sur le repérage des troubles du neurodéveloppement
Chirurgie : les protocoles de lutte contre l’antibiorésistance restent mal appliqués, regrette l’Académie