AFU 2022

Le cancer du rein se met à la surveillance active

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Publié le 05/12/2022
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Le 116e Congrès français d’urologie (AFU, Paris, 16-19 novembre) a permis de faire le point sur l'intérêt de la surveillance active dans les tumeurs du rein localisées. Alors que les études récentes rassurent quant aux risques de cette approche pour les patients, les nouvelles recommandations françaises lui accordent une large place. 

Crédit photo : SPL/PHANIE

La surveillance active active (SA) a révolutionné l’oncologie urologique, notamment pour les tumeurs de prostate, mais peine à diffuser dans le cancer du rein localisé. Aujourd’hui, la néphrectomie partielle ou élargie est le traitement de référence dans les tumeurs du rein, devant les thérapies ablatives (radiofréquences, cryothérapie), la radio­thérapie et la surveillance active. Mais, selon la SEARS database américaine, moins de 10 % des patients optent pour la SA lorsqu’elle est indiquée (chiffres 2018), c’est-à-dire lorsque la tumeur est localisée et à faible risque d’évolution. « Pourtant, les cancers du rein localisés, le plus souvent peu agressifs et peu évolutifs, gagnent à bénéficier de la SA, insiste le Dr Zine-Eddine Khene (service d’urologie, CHU de Rennes). Celle-ci est soutenue par des études rassurantes et codifiée dans l’actualisation 2022 des recommandations du Comité de cancérologie de l’AFU (CCAFU). »

Les études, dans leur large majorité, constatent en effet qu’on ne prend pas de risque en surveillant une petite tumeur rénale. « Ces masses grossissent de 0,28 cm par an en moyenne (< 0,5 cm par an pour 80 % d’entre elles), précise le chirurgien urologue, et 30 % n’évoluent pas du tout, avec un potentiel métastatique très faible, y compris pour les tumeurs qui présentaient, au début, des critères histologiques péjoratifs. Une étude majeure parue en 2021 sur 5 300 patients a calculé une survie similaire dans les groupes SA, néphrectomie partielle ou élargie, thérapies ablatives. »

Concernant la survie spécifique à 5 ans (registre prospectif DISSRM 2015), celle-ci est identique, que le patient ait bénéficié d’un traitement immédiat ou d’une SA, et ceci est observé même chez les sujets de moins de 60 ans. Un article clé en faveur de la SA a été publié en 2018 avec un suivi de 67 mois, où, quelle que soit l’évolution de la tumeur (nulle, lente, rapide, très rapide), aucune différence sur la survie globale n’apparaissait. Prédire la mortalité par cancer rénal est par ailleurs devenu plutôt simple avec le nomo­gramme de Kutikov en rentrant l’âge, la taille de la tumeur, le sexe et la race. Un autre travail montre « que les personnes âgées avec une tumeur rénale localisée décèdent d’une autre cause », résume Zine-Eddine Khene, alors même que « la diffusion de la chirurgie robot assistée pour les petites masses rénales pourrait faire craindre un surtraitement, en particulier chez les patients âgés ou souffrant de comorbidités. »

Ainsi, tandis qu’il vient d’être démontré que connaître l’histologie ne modifiait pas la survie globale, « le premier réflexe devant une petite tumeur du rein est désormais de temporiser et de ne pas hésiter à proposer une SA ». Le CCAFU propose la SA pour les tumeurs du rein localisées inférieures à 2 cm. Entre 2 et 4 cm, elle peut être proposée au même titre que la néphrectomie partielle ou une thérapie ablative.

En pratique, une imagerie abdominale est préconisée tous les 3 à 6 mois pendant la première année, puis tous les 6 à 12 mois si la lésion reste stable, ainsi qu’une imagerie thoracique à l’inclusion puis annuellement. Un traitement doit être proposé lorsque la vitesse de croissance dépasse 0,5 cm/an, si le patient est symptomatique ou si la tumeur dépasse 4 cm.


Source : lequotidiendumedecin.fr