Les résultats de l’étude AcSé crizotinib dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) confirment l'intérêt de cette molécule chez les patients présentant une tumeur mutée ROS1 ou MET.
L'ambition du programme AcSé, lancé en 2013 par l’Institut national du cancer (INCa), était de faire bénéficier à des patients en échec thérapeutique de thérapies ciblées hors autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le cadre d'un essai clinique de phase II.
Les essais crizotinib et vemurafenib, promus par Unicancer et soutenus par la fondation ARC pour la recherche sur le cancer, ont fait l'objet de communications lors de la World Conference on Lung Cancer (WCLC) qui s'est déroulée à Toronto du 23 au 26 septembre. Seuls les résultats concernant le CBNPC, qui concernent le plus grand nombre de patients, ont été présentés.
« Le programme AcSé a rempli ses deux objectifs : identifier de nouveaux biomarqueurs tumoraux au niveau national et montrer qu'il existe des molécules efficaces contre ces anomalies », indique au « Quotidien » le Pr Julien Mazières, oncologue thoracique au CHU de Toulouse qui a présenté l'essai vemurafenib au WCLC.
Indication incontestable dans les tumeurs ROS1
L'essai crizotinib du programme AcSé avait déjà fait l'objet d'une présentation en juin à l'American Society of Clinical Oncology (ASCO). Le crizotinib cible trois anomalies moléculaires : ALK, ROS1 et MET. Au début de l'essai en 2013, le crizotinib n'était indiqué que chez les patients atteints de CBNPC avec une translocation d’ALK. Depuis 2016, cette thérapie ciblée est aussi indiquée dans le traitement du CBNPC muté ROS1. « Les résultats intermédiaires obtenus avec AcSé ont contribué à l'obtention de cette extension », avance le Pr Mazières.
Ont été inclus 25 patients présentant une altération de type amplification de MET, 29 une mutation de MET et 39 une translocation de ROS1. Les réponses obtenues varient selon l'anomalie moléculaire.
Chez les patients avec une tumeur mutée ROS1, le taux de réponse de 68 % obtenu conforte l'intérêt de l'extension d'indication. « L'utilisation de crizotinib chez ces patients apporte un vrai bénéfice. Il s'agit d'une indication incontestable », commente le Pr Mazières.
Pour les tumeurs avec mutation de MET, le bénéfice est moins marqué, mais les résultats sont toutefois prometteurs, avec un taux de réponse de 40 %. « Ce ne sont pas les 60-70 % que l'on peut espérer d'une thérapie ciblée. Mais ce sont des patients pour lesquels il existe peu ou pas de possibilités thérapeutiques », souligne le Pr Mazières, précisant que le crizotinib vient d'être autorisé dans cette indication aux États-Unis. En France, la demande est en cours.
Chez les patients avec des amplifications de MET, le taux de réponse est de 32 %. « Une meilleure sélection des patients permettrait peut-être d'obtenir de meilleurs résultats », note l'oncologue. Aucune demande d'extension d'indication n'a été faite.
Les données confirment par ailleurs que le crizotinib est un médicament bien toléré, présentant une faible toxicité.
Bénéfice dans les tumeurs BRAF V600
Le vemurafenib est indiqué chez les patients atteints de mélanome présentant la mutation V600 dans le gène BRAF. De plus, « il existe une AMM en France pour l'association dabrafenib-trametinib chez les patients atteints de CBNPC mutés BRAF V600, mais elle n'est pas remboursée », raconte le Pr Mazières.
Démarré en 2014, l'essai vemurafenib a inclus 101 patients présentant un CBNPC muté BRAF V600 et 17 un CBNPC muté sur BRAF non V600.
Le taux de réponse est de 45 % pour les tumeurs V600. « Le vemurafenib représente ainsi une alternative à la combinaison dabrafenib-trametinib », estime le Pr Mazières. Pourtant, ces résultats n'ont pas abouti à une demande d'extension, l'oncologue évoquant la position de l’industriel.
Par ailleurs, le vemurafenib n'apporte aucun bénéfice chez les patients avec mutation non V600.
« Si l'essai crizotinib a permis de renforcer la légitimité de demande d'extension d'AMM dans les CBNPC, ce n'est pas le cas de l'essai vemurafenib », regrette le Pr Mazières.
Pour lui, « ces résultats soulignent la bonne organisation française dans le domaine de la recherche d'anomalies dans les cancers rares et montrent qu'il existe des traitements efficaces face à ces anomalies moléculaires ».
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