Courrier des lecteurs

Les médecins inspecteurs de santé publique, utiles mais mal aimés

Publié le 16/12/2022

Merci pour votre article intitulé « Les médecins de santé publique, un corps en voie de disparition ? » dans le numéro du 18 novembre (« Le Quotidien » n° 9963). Actuellement à la retraite, « radiée des cadres de la fonction publique » selon la formule consacrée, j'ai fait toute ma carrière de médecin en tant que médecin inspectrice de santé publique. Après ma spécialisation en santé publique, j'ai choisi immédiatement de passer le concours pour entrer à l'École de santé publique de Rennes. Un choix mûrement pensé, correspondant à mon intérêt pour la « chose publique » et le service public. Et effectivement, ce métier a correspondu à mes attentes.

D'abord, par la variété des thématiques que j'ai pu aborder : tous les champs de la médecine et plus globalement de la santé intéressent les médecins inspecteurs de santé publique (MISP), aussi bien la psychiatrie que les maladies infectieuses ou la santé des personnes âgées etc.

Ensuite, du fait de l'approche toujours transversale ; c'est la spécificité de la santé publique que de pouvoir examiner une question sous différents aspects : on a bien vu, avec l'épidémie de Covid, que l'épidémiologie n'était qu'un outil, et qu'il y avait lieu de prendre en compte les aspects humains, sociaux, économiques, éthiques, mais aussi la faisabilité, l'acceptabilité des mesures, etc.

Enfin, j'ai apprécié d'avoir des lieux d'affectation variés : j'ai pu exercer en service déconcentré, à l'époque en DRASS puis DDASS, où la connaissance du terrain est essentielle : suivre les projets des établissements, tisser des relations avec les professionnels et les usagers, aider à la concrétisation de nouveaux projets, faire l'interface avec les services administratif et financier de la DDASS, etc. J'ai aussi pu exercer en administration centrale où le travail est plus spécialisé, plus abstrait mais tout aussi passionnant : participer à l'élaboration des politiques de santé, d'organisation des soins, ou à l'évaluation des politiques publiques, en faisant entendre la voix des professionnels et des usagers, tout en utilisant des méthodologies de santé publique. J'ai aussi pu diversifier encore ma pratique en travaillant en agence, une autre utilisation de mon expertise en santé publique.

Un avenir incertain

Bref, beaucoup de variété, qui permet de se renouveler tout au long de la carrière. Certes, il faut souvent travailler dans l'urgence (la demande du cabinet du ministre, le vendredi soir, quand on travaille en administration centrale, était un grand classique…); et il faut faire avec le poids de l'administration (mais qui n'a pas le poids d'une institution avec laquelle il faut compter ?). Mais j'ai toujours eu un grand sentiment de liberté pour imaginer, créer, proposer des idées nouvelles, qui seront reprises (ou pas !).

Fondamentalement, j'ai eu l'impression à mon échelle de participer au service public. Alors oui c'est un métier passionnant, qui apporte des outils, une méthodologie, une vision transversale, une capacité à faire l'interface avec les professionnels, les usagers. Bref, utile à nos administrations. Mais parfois nous dérangeons… L'administration ne nous a jamais beaucoup aimés, c'est peut-être une des raisons qui expliquent l'avenir incertain du corps des MISP. Un grand merci donc de vous intéresser à cette profession et plus globalement à la santé publique.

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Dr Claudine Parayre

Source : Le Quotidien du médecin