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BILAN LIPIDIQUE : LE JEÛNE NE FAIT PLUS LA LOI

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Publié le 17/06/2016
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Le dogme du jeûne depuis au moins 8 heures avant de réaliser un bilan lipidique de routine ne tient plus. Selon une étude publiée dans l’European Heart Journal  le dosage de routine des taux de cholestérol et de triglycérides n'exige plus d’être à jeun.

Crédit photo : TEK IMAGE/SPL/PHANIE

> La nécessité de jeûner depuis au moins 8 heures avant de réaliser un bilan lipidique de routine n'a plus cours. Selon une étude publiée dans l’European Heart Journal (1) et réalisée sous l'égide de la Société européenne d'athérosclérose et de la Fédération européenne de chimie et des laboratoires cliniques, le dosage de routine des taux de cholestérol et de triglycérides n'exige plus d’être à jeun.

> L'étude, de type observationnel, a randomisé les profils lipidiques de 300 000 patients au Danemark, au Canada et aux États-Unis « non-jeûneurs » et « jeûneurs ». Il en ressort que les taux moyens des paramètres biologiques, 1 à 6 heures après un repas, ne varient pas significativement du point de vue clinique : +0,3 mmol/l pour les triglycérides, -0,2 mmol/l pour le cholestérol total, -0,2 mmol/l pour le LDL-c, + 0,2 pour le « remnant cholestérol » - taux de cholestérol non lié aux particules LDL et HDL -,  un facteur déterminant du risque d'accident ischémique cardiaque, -0,2 pour le non HDL-c  Les taux d’HDL-c, des apolipoprotéines A et B et ceux d’autres lipoprotéines ne sont pas affectés par le fait de manger ou pas avant leurs dosages. De même, les concentrations plasmatiques des lipides varient de manière similaire au cours de la journée, que l'on soit à jeun ou pas et restent comparables dans ces deux situations vis-à-vis de la prédiction du risque cardio-vasculaire.

La seule situation qui nécessite un dosage à jeun est celle d'une triglycéridémie supérieure à 5 mmol/l chez un patient non à jeun.

> Du coup, les valeurs seuils des examens de laboratoires doivent être revues en précisant le statut alimentaire du patient prélevé. Doivent désormais être considérées comme anormales en post-prandial les valeurs suivantes : triglycerides ≥2 mmol/L, cholestérol total ≥ 5 mmol/l, LDL-cholestérol ≥ 3 mmol/l, HDL cholestérol ≤ 1 mmol/l, apolipoprotéine A1 ≤1.25 g/L, apolipoprotéine B ≥1.0 g/L et lipoprotéine (a) ≥50 mg/dL (80e percentile). À jeun, le seuil anormal des TG est ≥ 1,7 mmol/l.

> De même, en post-prandial, la concentration de triglycérides qui met en jeu le pronostic vital, en rapport avec un risque de pancréatite, est fixée à plus de 10 mmol/l. Un LDL cholestérol > 13 mmol/L doit faire évoquer une hypercholestérolémie familiale homozygote, tandis qu’un LDL cholestérol > 5 mmol/L plaide en faveur d’une hypercholestérolémie familiale hétérozygote, et une lipoprotéine (a) > 150 mg/dl (99e percentile) indique un risque cardio-vasculaire très élevé.


> Depuis de nombreuses années, plusieurs pays européens (pays scandinaves principalement dont le Danemark depuis 2009) n'exigent plus d'être à jeun pour doser le cholestérol et les triglycérides. Et, depuis 2014, les recommandations du Nice se basent désormais sur les mêmes standards. Les experts rappellent que le dogme du jeûne reposait notamment sur les recos américaines de 2013 qui fixaient le taux de LDL-c à jeun comme référence avant d'instaurer un traitement par statines. Ainsi que l'équation de Friedewald qui inclut la triglycéridémie dans son équation.

 

1- http://eurheartj.oxfordjournals.org/content/ehj/early/2016/04/22/eurheartj.ehw152.full.pdf

Dr Linda Sitruk

Source : lequotidiendumedecin.fr