Méthodes d’apprentissage

L’apport des simulateurs

Publié le 06/10/2010
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Crédit photo : DR

PAR LES Drs JEAN BRÉAUD, JEAN-PAUL FOURNIER, DANIEL CHEVALLIERET LE Pr DANIEL BENCHIMOL *

LA SIMULATION chirurgicale s’est principalement développée depuis l’avènement de la cœlioscopie qui impose de nouvelles contraintes pour le chirurgien (adaptation à une vision en deux dimensions, diminution de la sensation de tact...) (1).

Plusieurs types de simulateurs ont été développés, des plus simples aux plus complexes, recréant des situations chirurgicales reproductibles, ces simulateurs s’intégrant ou non dans un programme pédagogique plus complet de formation (Fundamentals of Laparoscopic Skills, FLS, développé par la Society of American Gastrointestinal and Endoscopic Surgeryen1997).

- Simulateurs « simples » (type FLS) (photo 1).

Le principe repose sur l’acquisition d’une habilité technique en manipulant les principaux instruments cœlioscopiques (pinces à préhension, ciseaux, porte-aiguille, endo-loop…) sur des exercices définis (transfert de plots, découpage d’une compresse, réalisation d’une suture intra ou extra-corporelle…). Ces simulateurs, de faible coût, ont pour avantage d’utiliser des instruments réels. Dans notre expérience, ils sont pertinents à la phase initiale de l’apprentissage pour l’acquisition d’une habilité technique simple, mais aussi pour des praticiens plus expérimentés afin d’entretenir une gestuelle, notamment dans la réalisation de sutures cœlioscopiques.

- Simulateurs en réalité virtuelle (Simsurgery, Lapmentor, LapSim…) (photos 2 et 3).

Il s’agit d’une véritable interface en réalité virtuelle pouvant alternativement faire pratiquer à l’étudiant des exercices indépendants d’une situation anatomique (manipulation de caméra, pose de clip,...) et des exercices recréant des situations réelles (fixation d’une valve gastrique, dissection du lit vésiculaire…).

Certains de ces simulateurs contiennent de « modules » d’interventions (cholécystectomie, by-pass gastrique, sigmoïdectomie, ligature tubaire…) permettant de réaliser le temps cœlioscopique de l’intervention dans sa quasi-intégralité avec un degré de réalité tel qu’il existe la possibilité de choisir la position des trocarts, les instruments, de déclencher un saignement…

Certains simulateurs sont équipés de retour de force, afin d’améliorer le réalisme. Cet accessoire (responsable d’un coût élevé du simulateur), dans notre expérience, semble bénéfique dans les interventions virtuelles plus que dans les exercices d’apprentissage.

L’un des intérêts majeurs des simulateurs repose sur les outils d’évaluation développés dans les interfaces. Ainsi, à la fin de chaque exercice une série de paramètres est évaluée (temps, amplitude des mouvements, tractions excessives sur les tissus…) numériquement et par courbe, et peut être analysé.

Au-delà des gestes techniques.

L’utilisation de mannequins animés et informatisés, voire la recréation d’environnement médical virtuel (bloc opératoire « virtuel », avec un mannequin à la place du patient) présente de nombreuses applications pour l’apprentissage de la chirurgie. Le déroulement de scénarii cliniques permet d’affiner le sens diagnostique des étudiants, d’inculquer la notion de prise en charge multidisciplinaire (trinome anesthésiste – urgentiste – chirurgien devant un patient polytraumatisé aux urgences par exemple) mais aussi de former les équipes à la sécurité des soins, par la réalisation, par exemple, de scenarii d’application de protocoles de soins (Check-list de la Haute Autorité de santé…) dans un environnement réaliste.

Évaluation de la qualité de l’enseignement.

Il est clairement établi que la simulation cœlioscopique permet une amélioration de la courbe d’apprentissage pour un geste technique donné, et une réduction du nombre d’erreurs à la phase initiale de l’apprentissage pour des procédures courantes (2).

De plus, notre expérience met en évidence un gain en termes de performances techniques pour les internes débutant leur cursus, pour des éléments simples tels le repérage dans l’espace (exercice de manipulation de caméra), la coordination bimanuelle.

Plusieurs scores globaux d’habilité technique (Global Assesment of Laparoscopic Skills [3] ou Objective Structured Assessment of Technical Skills [4]) ont été développés et devraient faire l’objet d’une évaluation plus précise dans les années à venir afin d’uniformiser les résultats de l’apprentissage par simulation.

Sur les éléments indépendants de l’habilité technique, conformément aux données de la littérature, notre expérience préliminaire identifie un fort bénéfice de ces techniques pour le travail multidisciplinaire, le raisonnement médical et l’application de protocoles de soins.

Les outils de simulation pour l’apprentissage de la chirurgie sont actuellement en plein essor et autorisent une nouvelle forme d’enseignement venant compléter la formation universitaire. Ils s’intègrent parfaitement dans la notion plus globale d’école de chirurgie à dimension régionale, venant compléter l’apprentissage effectué dans les laboratoires d’anatomie, les laboratoires de chirurgie expérimentale et, bien entendu, l’apprentissage clinique à l’hôpital qui reste déterminant.

*Centre de Simulation Médicale, Faculté de Médecine de Nice.

(1) Jones DB, Laparoscopic Surgery : principles and procedures ; 2nd ed. New York : Marcel Dekker, 2004.

(2) Schout BMA, Surg Endosc 2010.

(3) Vassiliou MC et al. Am J Surg 2005 ; 190 :107-13.

(4) Faulkner H et al. Acad Med 1996 ;71 :1363-5.


Source : Bilan spécialistes