LA MISSION CHARGÉE de plancher sur la refondation de la médecine libérale a rendu sa copie (Le Quotidien du 14 avril). Entre autres recommandations, le document remis par le Dr Michel Legmann au Président de la République prévoit plusieurs pistes de réforme de la formation initiale des médecins.
Devant l’explosion du remplacement (voir encadré) et la percée du salariat, la mission pilotée par le président de l’Ordre des médecins cherche à redorer le blason de l’exercice libéral en se tournant vers les jeunes générations, l’objectif étant de les sensibiliser le plus tôt possible à la médecine de ville et de faciliter leur intégration pratique dans ce secteur libéral.
Car le constat est édifiant : seuls 9 % des nouveaux praticiens installés ont choisi ce mode d’exercice en 2008. « En 1997, les courbes relatives à l’exercice libéral et au salariat se sont croisées au détriment du secteur libéral, commente le Dr Michel Legmann . Le salariat est devenu plus attractif mais les pouvoirs publics ne semblent pas souhaiter la fin de l’exercice libéral. Lequel est apprécié des patients et est moins coûteux pour la société ». Les statistiques de la région Picardie, rendues publiques lors de la présentation des atlas régionaux de la démographie médicale de l’Ordre, sont particulièrement alarmistes. La densité médicale y est la plus faible de France (238 médecins pour 100 000 habitants contre 290 en moyenne nationale). Seuls 5 % des nouveaux praticiens picards se sont installés en libéral. La majorité des praticiens exercent aux alentours d’Amiens et parmi les 49 spécialités recensées par l’Ordre, 21 n’ont connu… aucune installation en libéral dans la région entre 2008 et 2009. « Malgré l’augmentation du nombre de places ouvertes aux épreuves classantes nationales (ECN) dans la région, la Picardie a eu une baisse de 30 % de nouvelles inscriptions, explique le Dr Patrick Romestaing, président de la section Santé publique et démographie médicale au Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM). La moitié des étudiants quittent la région une fois formés ». Ces résultats semblent traduire l’échec de la politique du gouvernement qui consiste à augmenter le nombre de postes d’internat dans les régions sous denses pour y favoriser l’implantation de médecins. Voilà un premier défi de taille pour les agences régionales de santé (ARS) : fidéliser les médecins à leur région de formation.
Découverte et compagnonnage.
Face à ce constat, la mission Legmann suggère de réviser la formation des médecins en orientant davantage les étudiants vers le milieu ambulatoire. Pour permettre aux étudiants de mieux appréhender l’exercice libéral, elle propose de rendre obligatoire un stage de deux mois de découverte de la médecine libérale en PCEM 2. Cette perspective est accueillie avec pragmatisme par les étudiants. « C’est une bonne chose d’encourager les stages en libéral mais cela me semble difficile à mettre en place », commente Chloé Loyez. La présidente de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) souligne qu’un stage de médecine générale est obligatoire pendant le premier cycle des études depuis 1997. Mais son organisation est très différente d’une faculté à une autre (voir ci-dessous). « Commençons déjà par faire appliquer la loi », indique-t-elle. Toujours pour sensibiliser les futurs praticiens à la médecine générale, les experts de la mission Legmann recommandent d’intégrer l’enseignement de cette spécialité dans le deuxième cycle. Ils plaident également pour que tous les internes de médecine générale suivent deux semestres de stage de spécialisation au cours du troisième cycle. Et ils proposent surtout la création d’un nouveau statut de « remplaçant assistant ». Celui-ci permettrait aux internes de médecine générale ayant validé seulement trois semestres « de remplacer un praticien titulaire mais également de pouvoir bénéficier de son compagnonnage en travaillant à ses côtés ». Pour le Dr Walter Vorhauer, secrétaire général du CNOM, « un interne remplaçant assistant pourrait avoir une journée par semaine consacrée à la présence dans un cabinet médical ».
Ces mesures satisfont l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). « Nous nous battons depuis plusieurs années pour avoir davantage de stages en ambulatoire pendant notre formation, indique son président Bastien Ballouet. Nous demandons à voir les modalités du remplaçant assistant. S’il permet à l’interne d’assimiler l’exercice sur le terrain comme le stage autonome en soins primaires ambulatoire supervisé (SASPAS), pourquoi pas ? ».
Enfin, la mission Legmann suggère que les jeunes médecins effectuent obligatoirement leur post-internat dans la région où ils ont effectué leur internat. Un casus belli pour Grégory Murcier, président de l’Intersyndicat national des internes des hôpitaux (ISNIH). « Cette mesure est nulle et non avenue, affirme-t-il. Il est déjà difficile aujourd’hui d’accéder à un post-internat. Ce n’est pas comme cela que l’on fixera les gens dans leur région de formation ».
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