Quel héritage ?

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Publié le 03/05/2018
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Il y a 50 ans, ils ne furent pas les premiers à lancer la contestation. Mais les carabins ne restèrent pas longtemps à l'écart du mouvement. À l’époque, Bernard Kouchner faisait partie du comité de grève de la fac de médecine de Paris. Avec le recul, il décrit mai 1968 comme une sympathique révolte d’opérette. Et de fait, que reste-t-il de cette agitation pour le monde de la santé ? En apparence, pas grand-chose : plus que « 68 », c’est bien « 58 » – avec la création des CHU — qui demeure le millésime fondateur pour notre système de soins. Tout au plus peut-on pointer la suppression du concours d’externat, qui, quelques mois après la fin des barricades, ouvrait l’hôpital à tous en second cycle. Ou la remise en cause du modèle psychiatrique traditionnel. En sens inverse, la création, quelques années plus tard, du numerus clausus n’est pas tout à fait étrangère aux événements, ses partisans d'alors y voyant alors un moyen d’éviter que la « chienlit » ne s’installe en médecine…

Doit-on pour autant fermer le ban sur cette commémoration en abandonnant « 68 » au rayon souvenirs de nos bibliothèques ?  Les historiens jugeront. En gardant en mémoire que c’est sur la durée que cette éruption printanière a essaimé. À l’instar de ce tract distribué aux lycéens trois ans plus tard : « Apprenons à faire l'amour...» L'initiative fit scandale et vaudra à son auteur, le Dr Jean Carpentier, d’être suspendu par l’Ordre. La revendication à la liberté individuelle allait pourtant finir par imposer son tempo, y compris au corps médical. Même s'il fallut attendre un peu pour que soit reconnu le droit à l’IVG… et beaucoup plus pour qu'un droit des patients se concrétise… Tout cela serait-il quand même advenu si les enfants de mai ne s'en étaient pas mêlés ? Un demi-siècle plus tard, la question reste posée.


Source : Le Quotidien du médecin: 9662