Éditorial

Blue monday

Par
Publié le 20/01/2020

Pour un ministre de la Santé, les grognes estudiantines, celles des internes en particulier, sont un cauchemar. D’abord, parce que ces jeunes pousses de la médecine font tourner l’hôpital. Ensuite, parce que les futurs médecins ont une forte capacité de mobilisation, à l'évidence plus que leurs ainés. Enfin, parce que leurs actions sont généralement populaires auprès de la population, qui a toujours eu un faible pour la jeunesse, surtout quand elle porte blouse blanche. En l’occurrence, les motifs de la colère sont cette fois si techniques qu’ils passent sans doute très au-dessus du potentiel de compréhension du lambda : on demande le report du « matching » pour atterrir dans le stage de son choix en fin d’internat, on exige le respect des 10 demi-journées de travail à l’hôpital, on refuse de voir rémunérées ses heures sup' avec des « demi-gardes » et on s’oppose à une délivrance plus tardive de la licence de remplacement. Emmenés par l’ISNI, leur intersyndicale, les internes viendront, ce «blue monday, signifier ces revendications sous les fenêtres de la ministre.

Tout ce ramdam a évidemment de quoi inquiéter la locataire de l’avenue de Ségur, qui a tout lieu de craindre une agrégation des conflits alors que la longue grève des urgences affecte encore les établissements et que 1 200 chefs de service ou d’unité ont annoncé la semaine dernière qu’ils démissionnaient de leurs fonctions administratives. Patatras ! Face au risque d’incendie qui menace toujours l’hôpital, la ministre doit jouer son va-tout. Il lui faut à tout prix segmenter les mécontentements, voire diviser les acteurs hospitaliers. Une tactique utilisée ces derniers jours auprès des jeunes, non sans un certain succès, puisque les futurs généralistes de l’ISNAR-IMG se contentent des annonces faites concernant les primes et le contrôle des volumes horaires. La mobilisation d’aujourd’hui est néanmoins à suivre comme le lait sur le feu. De son succès ou non dépendra en partie la suite du conflit hospitalier.

Jean Paillard

Source : Le Quotidien du médecin