Des revalorisations salariales, mais jusqu'où ?

Dernière ligne droite pour le Ségur

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Publié le 03/07/2020
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L'exécutif doit arbitrer sous pression la question de l'ampleur des revalorisations salariales du secteur hospitalier. Après un an de conflit et un engagement sans faille pendant la crise sanitaire, paramédicaux, internes et praticiens attendent des gestes forts.
Mardi dernier, à Paris et dans des dizaines d'autres villes, les blouses blanches ont à nouveau battu le pavé

Mardi dernier, à Paris et dans des dizaines d'autres villes, les blouses blanches ont à nouveau battu le pavé
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Le Ségur de la santé répondra-t-il, au moins partiellement, aux attentes des blouses blanches ? Au terme de six semaines de négociations, et à l'heure des arbitrages, les positions des soignants et du gouvernement semblaient encore trop éloignées pour entrevoir un compromis satisfaisant. 

En début de semaine, trois documents de travail préparatoires sur la revalorisation des carrières – pour les externes, les internes et les médecins hospitaliers – ont provoqué l'ire des syndicats. 

Des négos jusqu'au bout

Après avoir proposé une enveloppe globale de six milliards d'euros aux personnels non-médicaux, Olivier Véran a annoncé seulement 300 millions d'euros pour les médecins hospitaliers, environ 150 millions d'euros pour les internes et 50 millions pour les externes. Autant de « douches froides » pour les syndicats, qui réclamaient un chèque total de 7 milliards d'euros. Toutefois, les négociations salariales devaient se prolonger toute la semaine, le gouvernement voulant croire à un accord global, socle des futurs accords de la santé.    

Pour les internes, l'exécutif a mis sur la table une augmentation dès septembre 2020 de 10 % des émoluments de base en première et deuxième année et de 5 % pour les années suivantes. Des hausses limitées qui représentent entre 100 et 150 euros brut par mois, très loin de la revendication centrale de +300 euros net mensuels. La revalorisation des indemnités forfaitaires de garde est acquise mais, là encore, les juniors refusaient de se contenter d'une dizaine d'euros supplémentaires...

Concernant les externes cette fois, les propositions initiales du gouvernement (+50 à 120 euros brut selon l'année d'étude) aboutissent à des émoluments mensuels compris entre 200 et 400 euros brut. Les étudiants réclament 390 euros net au minimum en quatrième année.

Saupoudrage

Du côté des PH, c'est à nouveau la crainte du saupoudrage qui domine. L'exécutif a certes entériné la hausse de l'indemnité d'engagement de service public exclusif (IESPE). Mais les premiers montants avancés (600 euros brut par mois pour les praticiens ayant moins de 15 années de service public et 900 euros brut au-delà) faisaient craindre une mesure cosmétique. Les syndicats revendiquent 1 000 euros net quelle que soit l'ancienneté pour cette indemnité emblématique de l'attachement au service public.

Mais c'est surtout l'évolution des grilles salariales des PH qui a soulevé la colère des médecins. La suppression envisagée des « trois premiers échelons de la grille » et la création en sommet de grille « d'un ou deux échelons supplémentaires » en fin de carrière semblait très loin du schéma attendu pour améliorer l'attractivité du service public. Les PH ont avancé une entrée de carrière à 5 000 euros net et une sortie à 10 000 euros net pour fidéliser les praticiens expérimentés. Reste à savoir jusqu'où ira le gouvernement. 

Choc

« Trahison », « désillusion », « choc de déception »… En attendant que les lignes bougent en leur faveur, les syndicats de PH ont affiché leur déception cette semaine, à la hauteur des attentes. « Ce n'est pas le dixième de ce qu'on demandait », a prévenu Jacques Trévidic, président d'Action praticiens hôpital (APH). « C'est le pire protocole que j'ai connu », s'indignait le Dr Rachel Bocher, son homologue de l'INPH. Hier, les syndicats devaient formuler de nouvelles contre-propositions. 

Les jeunes de l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) et de l'Association des étudiants en médecine de France (ANEMF) ont réclamé les premiers une prolongation des négociations. « Le Ségur ne peut être clôturé trois jours après une première proposition concrète », écrivent-ils.

Mardi dernier, plusieurs milliers de blouses blanches ont manifesté dans des dizaines de villes pour la deuxième journée d'action nationale post-Covid. Une autre façon de souligner que le compte n'y est pas. 

Martin Dumas Primbault

Source : Le Quotidien du médecin