Accusation de viol et d’agressions sexuelles à la faculté de Tours : le ministère lance une enquête

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Publié le 02/05/2022

Crédit photo : S.Toubon

« La vérité doit éclater », scandait, il y a deux semaines, l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), suite aux révélations d’agressions sexuelles et de viol à l’encontre de cinq étudiantes en médecine tourangelles. Dans le viseur des carabins : la réaction tardive de l'Université de Tours pour éloigner l'agresseur présumé.

Pour faire toute la lumière sur cette affaire sensible, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche (Mesri) a diligenté une enquête, confiée à l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche. Une réaction rapide, que salue l’Université de Tours, « consciente de l’incompréhension et de la colère suscitées par la révélation des accusations de viol et agressions sexuelles ». Le rapport ministériel devrait notamment trancher sur l'éventuelle « complaisance » qu’aurait pu avoir le doyen de la faculté de médecine de Tours vis-à-vis de l’agresseur présumé.

Détention provisoire

En 2020, cinq étudiantes avaient déposé plainte pour agressions sexuelles et viol à l’encontre d’un autre carabin, âgé d’une vingtaine d’années à l’époque. Les faits visés auraient été commis entre 2013 et 2020 lors de soirées estudiantines, alors que les victimes étaient la plupart du temps endormies.

Placé en détention provisoire en septembre 2020 – puis libéré deux mois plus tard sous contrôle judiciaire – le suspect avait toutefois pu poursuivre son cursus à la faculté de Limoges, exerçant notamment en stage au sein du service de gynécologie d’un centre hospitalier de Nouvelle-Aquitaine.

« S’il y a eu complaisance de la part de l’Université, ce serait gravissime »

« Face à des accusations d’une telle gravité, comment expliquer que les doyens de médecine de Tours et de Limoges aient favorisé le transfert de faculté d’un étudiant à peine sorti de détention provisoire ? Comment expliquer que cet étudiant puisse être en stage de gynécologie malgré les charges portées contre lui ? », s’interrogeait fin avril l'Anemf, qui souhaitait mettre fin à « l’omerta à l'Université » en exigeant une enquête le plus rapidement possible du ministère.

Contacté ce lundi 2 mai, Alexis Loupan, président de l’Anemf se félicite de la réaction du ministère. « Ça va dans le bon sens, c’est une première victoire », réagit-il. L’étudiant en médecine espère que l’enquête ministérielle permettra « de démêler le vrai du faux. S’il y a eu complaisance de la part de l’Université vis-à-vis du mis en cause, avec une volonté d’occulter les choses, ce serait gravissime ».

Le doyen récuse en bloc

Complaisance ou dysfonctionnement interne ? Sur place en tout cas, les carabins s’interrogent sur le temps écoulé entre ces plaintes pour des faits aussi graves et l’éloignement de l’agresseur présumé. Contactée par « Le Quotidien », Noémie, étudiante en médecine à Tours se souvenait que l’agresseur présumé « s’était même retrouvé, après la plainte, en stage au même étage que l’une de ses victimes ». En 2020, les accusations avaient déclenché « une vraie colère chez les étudiants » du campus, Noémie regrettant « une forme de protectorat et d’impunité » pour l’agresseur.

Doyen de la fac de médecine de Tours, le Pr Patrice Diot a toujours récusé en bloc les accusations à son encontre et nie avoir voulu protéger le suspect. Suite au signalement des victimes, « j’ai immédiatement procédé au niveau de l’Université à une suspension de l’étudiant, pour protéger ces étudiantes qui ne se sentaient pas la force de le retrouver en stage ou au sein de la faculté, nous voulions l’empêcher de croiser les victimes », assurait-il le 20 avril au « Quotidien ». 

Enquête flash

Les résultats de l’enquête « flash » du ministère devraient être rendus rapidement, sous une dizaine de jours. Le 4 mai, l’Anemf sera auditionnée par l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche. « Nous espérons que les signalements comme ceux-là soient, à l’avenir, toujours suivis de mesures sur le terrain, qu’ils ne restent pas lettre morte », avance Alexis Loupan. Il imagine « un éloignement automatique du mis en cause » ou « d’éviter qu’il ne se retrouve en stage dans des services hospitaliers problématiques », comme un service de gynécologie.

Dans l’attente de la remise du rapport, l’Université de Tours indique ne faire « aucun commentaire » supplémentaire, mais « renouvelle son soutien aux victimes ».


Source : lequotidiendumedecin.fr