« Victime d’un système qui m’a broyée », une interne appelle à libérer la parole à l’hôpital

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Publié le 18/01/2020

Crédit photo : Photo d'illustration S.Toubon

« Nous sommes des milliers d’internes en souffrance. Il faut dire haut et fort que ce n’est pas de notre faute, mais que c’est le système qui est malade ! » Interne en médecine, Louise (*) a vécu cette souffrance dès le début de son stage à l’hôpital, en novembre 2018. Près d’un an plus tard, la jeune femme de 26 ans jetait l’éponge. Devant son chef de service, elle éclatait en sanglots, au bout du rouleau, épuisée physiquement et psychologiquement.

Dans un texte poignant qu’elle a fait parvenir au « Quotidien » (lire ci-dessous), elle raconte avec beaucoup de lucidité cette expérience personnelle qui l’a conduite au burn-out. « Ce qui m’est arrivé, d’autres internes le vivent. Mais personne n’ose en parler. Chacun se débat seul dans son coin, confie Louise. Si j’ai écrit ce texte, c’est pour faire part de ma souffrance et la partager avec eux. Qu’ils puissent réaliser par eux-mêmes quand ça ne va pas, qu’ils ne sont pas les seuls à vivre ça mais qu’il y a des issues. » Tant qu’il n’y aura pas plus de témoignages, « la parole ne sera pas libérée et rien ne changera », dit-elle.

La jeune femme n’en veut à personne mais elle décrit un système hospitalier inhumain, au bord de l’implosion, où les internes sont trop souvent laissés à l’abandon par un encadrement débordé. « Les chefs n’ont pas de temps pour leurs internes. Dans les établissements en périphérie moins bien organisés, la situation est pire, raconte Louise. On est livré à nous mêmes, à gérer parfois des soins palliatifs, des situations de mort imminente. À la fatigue s’ajoute une énorme pression psychologique. »

Les antidépresseurs pour tenir le choc

Après quelques mois de stage, la jeune interne est mise en arrêt maladie une première fois, pour une durée d’une semaine. « J’ai fait l’erreur de reprendre trop tôt au lieu de me soigner, se souvient-elle. J’avais l’impression de laisser tomber un service déjà en sous effectif. On culpabilise, alors on reprend le travail à plein temps, on enchaîne les gardes, on prend des benzo pour tenir le choc… »

À l’époque, personne ne se préoccupe de son état. « On ne m’a pas demandé comment j’allais. Au lieu d’être prise en charge, j’ai été laissée à l’abandon. Le chef du service dans lequel j’étais affectée après mon arrêt ne savait même pas ce qui m’était arrivé ! »

Louise ne tourne pas définitivement la page de la médecine. Aujourd’hui, elle donne la priorité à sa santé. « Je vais prendre soin de moi. Je vais voir le monde, faire du bénévolat, faire des choses qui me tiennent à cœur, raconte la jeune femme. Et puis je me poserai la question de revenir à l’hôpital. Quelque part, j’ai envie de me battre pour ça, de prouver que ce n’est pas moi le problème mais que c’est le système qui dysfonctionne. »

(*) Prénom d'emprunt.


Source : lequotidiendumedecin.fr