Faire de ses confrères des amis, cela peut prendre du temps. Parfois, la personnalité des collègues en question peut même rendre l’entreprise impossible. C’est pourquoi certains généralistes qui désirent travailler en toute camaraderie ont décidé de prendre les choses à l’envers, et de faire de leurs amis des collègues. Et d’après ceux que Le Généraliste a pu interroger, cela semble plutôt être une bonne idée.
« Ce n’est que du positif », explique par exemple le Dr Patrick Muller, généraliste marseillais et président de SOS Médecins dans la cité phocéenne. Il y a une douzaine d’années, il a décidé de monter un cabinet avec trois amis qui travaillaient aussi avec SOS. « On savait avec qui on se mettait, ce n’était donc pas comme certains mariages qui capotent au bout de six mois », plaisante-t-il. Après plus d’une décennie passée à travailler ensemble (le cabinet a largement dépassé les noces d’étain), le bilan est largement positif. Patrick Muller vante notamment la fluidité des relations qu’il entretient avec ses collègues-amis. « On s’appelle dès qu’il y a un problème avec un patient, c’est un peu comme à l’hôpital », estime-t-il.
Le Dr Anna Christidis, qui s’est installée avec une amie rencontrée à la fac dans une maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) de banlieue parisienne, apprécie elle aussi cette fluidité. Elle estime que la relation d’amitié permet encore plus d’entraide entre collègues, ce qui présente selon elle des avantages pour elle-même, mais aussi pour les malades. « On parle vraiment beaucoup ensemble, et je pense que c’est bénéfique pour les patients aussi », indique-t-elle.
Pas avec n’importe qui
Mais attention, si s’associer avec un ami semble améliorer l’ambiance au travail, le choix de la personne a une importance capitale. « J’ai beaucoup d’amis généralistes, et je n’aurais pas pu m’installer avec tous », insiste Anna Christidis. D’après elle, la personne idoine n’est d’ailleurs pas forcément celle dont on est le plus proche. « C’est celle à qui on sait qu’on pourra facilement tout dire, et dont on pourra tout entendre », analyse la généraliste.
Même son de cloche du côté du Dr Lucie Gervais, généraliste installée en 2016 près du Havre avec une amie « rencontrée le premier jour de P2 ». Pour elle, le plus important est la confiance, et la connaissance mutuelle. « Chacune connaît les travers de l’autre, et nous sommes donc capables d’anticiper », se félicite-t-elle. Une question d’autant plus cruciale que les deux amies ont l’intention d’ouvrir une maison médicale de cinq généralistes et quatre infirmières dans leur village à l’horizon 2019.
Et l’amitié dans tout ça ?
Reste la question de la relation amicale. Ne risque-t-elle pas de se diluer dans la relation professionnelle ? Pour Patrick Muller, il n’y a pas de risque. « On mange ensemble tous les quinze jours, on se voit le samedi avec nos épouses », témoigne-t-il. Même réaction de la part d’Anna Christidis. « Avant d’être associées, on est meilleures copines », indique-t-elle, se réjouissant de pouvoir encore faire des week-ends « que toutes les deux » malgré les contraintes du cabinet. Quant à Lucie Gervais, elle estime que l’installation commune a renforcé sa relation avec son amie. « On s’était un peu perdues de vue pendant l’internat, mais maintenant, je la considère un peu comme quelqu’un de ma famille », se réjouit-elle.
Quelqu’un de sa famille ? Cela est aussi une option, qu’a tentée le Dr Pierre Wallart, installé depuis près de dix ans avec son frère dans un village du Nord. Ce qui lui permet d’expérimenter très concrètement « la fraternité que l’on trouve dans le mot confraternité », sourit-il. Il affirme apprécier travailler avec quelqu’un qu’il connaît « depuis très longtemps », mais ajoute qu’il « faut faire attention à ne pas tout mélanger ». La relation de travail demande donc d’après lui une attention accrue pour faire la part des choses entre le frère et le confrère. « Dans les dîners de famille, on fait attention à ne pas parler boulot », assure-t-il. Bref, ce qui se passe au cabinet… reste au cabinet.
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