S'installer où l'on a grandi

Publié le 15/05/2020

Ouvrir un cabinet médical sur les terres de son enfance… c’est boucler la boucle et mettre, espère-t-on, tous les atouts de son côté. Mais ce peut être aussi un vrai challenge ! Certains jeunes médecins profitent d’un environnement connu pour se lancer dans un projet d'installation. Le point avec des candidats.

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Crédit photo : GARO/PHANIE

Le choix du lieu d’installation est rarement anticipé au début des études. Mais les aléas de la vie et les rencontres participent parfois d’une décision inattendue ! « Dans ma vie de jeune adulte je n’aurais jamais imaginé retourner où j’avais passé mon enfance et mon adolescence », témoigne le Dr Gautier Laborie, qui, avec l’appui paternel a pu ouvrir en 2018 son cabinet individuel au centre de la ville de Montauban. « Finalement, l’attachement à la région et surtout l’amour et l’harmonie d’une vie familiale ont été les détonateurs de mon installation dans la même ville où habite depuis toujours ma propre famille. » Dès la quatrième année de médecine et pendant son internat, le futur médecin décide avec sa compagne de se baser dans une ville moyenne pour y effectuer les stages et remplacements.  Ma femme infirmière pouvait facilement travailler et moi, je pouvais moi rayonner à Cahors, Albi, Toulouse... dans la perspective d’une installation locale.

Les avantages certains

Ces jeunes praticiens peuvent compter sur des appuis sûrs. Le patronyme est connu : ainsi cela peut faciliter la création rapide d’une patientèle, « rassurée et bienveillante » !

Dans ces périodes de pénurie de médecins le jeune généraliste peut choisir plus facilement son mode d’exercice : « Même si je suis à contre-courant du mouvement actuel, j’ai pu choisir exactement l’exercice libéral que je voulais. Je travaille seul et salarie uniquement l’infirmière, ma femme ; nous travaillons donc ensemble », continue Gautier Laborie.

Le jeune médecin a eu un fort soutien de l’entourage professionnel, voire des conseils et un accueil du réseau paramédical et médical existant enclin à une certaine bienveillance. Cela favorise une prise en charge rapide, un « travail de réseau » fluide et coordonné avec des paramédicaux, d’autres spécialistes ou le milieu hospitalier.

Au niveau financement, les parents ou la famille élargie peuvent favoriser l’installation, proposant des locaux ou de l’immobilier . « Je peux être indépendant car l’immeuble est familial,» ajoute le Dr Laborie. Cela offre une sécurité locative et le réancrage régional.

S’installer sur les terres de l’enfance peut être vraiment agréable mais à juste distance. Une vingtaine de kilomètres séparent le Dr Simon Chabas des autres membres de sa famille. « Après des stages à Lyon, dans l’Ain et des remplacements à l’île de La Réunion, je voulais m’installer dans un coin que je connaissais géographiquement, culturellement, amicalement et familialement, précise Simon Chabas. C’était mettre des atouts de mon côté, je connais les petites routes autour d’Aix-en Provence, le tempérament un peu "bourru" de la population, son accent et même quelques mots d’argot provençal ! »

Car enfin, l’amour de la terre, l’environnement géographique, humain et culturel participent de l’épanouissement du médecin en lui servant de points de repère.

Enfin, pouvoir s’appuyer sur la famille pour la garde des petits-enfants par exemple, contribue à améliorer la qualité de vie et peut être une aide précieuse pour démarrer.

Les challenges

Pour certains le retour sur les terres natales s’accompagne cependant de conditions précises : « Je ne veux en aucun cas devenir le médecin de La famille ; soigner grand-père, grand-mère, ce n’est pas mon truc », assure encore Simon Chabas. Les règles sont bien établies, et les conseils parentaux s’arrêtent à la porte du cabinet. Le jeune installé doit défendre son précarré et mettre des limites à son travail.

Si le regard de l’entourage est bienveillant, il peut aussi augurer d’une certaine pression. Sous le « joug » familial, le jeune praticien peut sentir le poids d’une responsabilité ou d’enjeux qu’il se colle lui-même à la peau. Alors prendre du recul, une certaine distance, apprendre à dire non et s’imposer à son rythme comme professionnel, c’est important !

Enfin quel que soit le lieu, il importe quand on s’installe de faire son entrée dans une vie que l'on a choisie ! Si on retourne là où on a grandi comme ailleurs, forcément on fait le deuil de certaines libertés, découvertes, horizons géographiques, et rencontres ! « J’assume tout, dit encore Gautier Laborie, je ne regrette rien, même s’il a fallu s’habituer après Bordeaux et Toulouse au retour à la vie dans une ville moyenne, moins riche d’évènements. » On retrouve aussi les même têtes, les même « gens » ! Après ces années de balade, on a grandi, on s’est enrichi et ceux qu’on retrouve n’ont pas bougé, pas changé. C’est peut-être là que réside l’essentiel de la réadaptation.

A. C.


Source : lequotidiendumedecin.fr