Communiqués acides en rafale, tribunes cinglantes, tractations auprès des syndicats et des associations de patients, lobbying pour obtenir gain de cause…
Ces dernières semaines, la querelle entre pédiatres hospitaliers/hospitalo-universitaires et enseignants de médecine générale concernant la qualité de la formation des futurs généralistes en santé de l’enfant s’est transformée en bataille de tranchées (et de communication), chacun tentant d’imposer sa vision des choses.
Une formation dégradée ?
Depuis la refonte de la maquette de l’internat de médecine générale à quatre ans (nouveau DES acté par arrêté en août dernier), les pédiatres hospitaliers du SNPEH ainsi que la conférence des présidents de commissions médicales d’établissement (CME) de CHU, très mobilisés, exigent un stage de « six mois » – et non pas trois – en secteur pédiatrique hospitalier, seule façon selon eux d’assurer une formation qualitative complète des futurs généralistes à la santé de l’enfant.
Le Pr Rémi Salomon, chef du service de néphrologie pédiatrique à l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) et président de la Conférence des présidents de CME de CHU, persiste et signe. « Réduire ce stage à trois mois est une erreur, c’est bien trop court pour former les internes ». Si le professeur de pédiatrie ne remet pas en cause la capacité des généralistes à former leurs futurs confrères à la santé de l’enfant, il estime qu’un semestre en service hospitalier demeure indispensable. « La pratique de la pédiatrie en ville n’est pas la même qu’à l’hôpital, insiste-t-il. Un stage en service de pédiatrie ou en urgences pédiatriques permet de découvrir d’autres aspects de la pratique, avec des enfants plus gravement malades : des nourrissons en état de mal épileptique convulsif ou en crise d’asthme sévère ».
Des internes pour faire tourner les services ?
Mais pour le Pr Olivier Saint-Lary, président du Collège national des généralistes enseignants (CNGE), l’argument pédagogique brandi par les pédiatres hospitaliers et hospitalo-universitaires est « fallacieux » et ne tient pas la route. « La formation à la santé de l’enfant des futurs généralistes – qui assurent aujourd’hui plus de 80 % des consultations des enfants de moins de 16 ans – s’acquiert en grande partie en ambulatoire ! Malheureusement, de nombreux services hospitaliers très spécialisés n’offrent pas une formation adaptée à l’activité future des praticiens. Savoir prendre en charge un enfant en néonatalogie ne correspond pas aux besoins de formation, illustre l’enseignant. Je crois surtout que les pédiatres hospitaliers s’inquiètent de la façon dont ils vont pouvoir continuer à faire tourner leurs services ».
Sans renoncer à l’argument de la qualité pédagogique des stages hospitaliers, le Pr Rémi Salomon ne dément pas ce besoin criant de ressources médicales. « Ce n’est pas politiquement correct de le dire mais oui, la réalité est que dans certains services hospitaliers, les équipes risquent d’être très fragilisées sans internes. Certains services d’urgences pédiatriques pourraient même fermer comme on a pu récemment le voir. Notre système de santé tient sur deux jambes. Il faut une médecine de ville et un hôpital qui marchent bien ».
Dans ce contexte inflammable, une réconciliation est-elle possible ? Rien n’est moins sûr. Face à la communication jugée « choquante, intempestive et condescendante » des pédiatres hospitalo-universitaires à leur égard, les généralistes enseignants (CNGE, Snemg) rejoints par plusieurs syndicats de praticiens libéraux installés (MG France, CSMF, UFML-S et FMF) et représentants des juniors (Isnar-IMG, ReAGJIR et Anemf) ont annoncé leur intention de se « retirer » des Assises de la pédiatrie. Tous dénoncent la « vision restreinte, extrêmement hospitalo-centrée » de la santé des enfants. Ambiance…
Les internes favorables au maintien du stage libre
La création d’un stage libre au moyen de la fusion du stage de gynécologie et de pédiatrie – réduits respectivement de six à trois mois – pour libérer un semestre dans la nouvelle maquette de médecine générale est une mesure largement soutenue par les internes de médecine générale. Dans une enquête menée par l’Isnar-IMG (772 répondants), 75 % des futurs généralistes consultés y sont favorables. Toutefois, les internes parisiens en médecine générale, représentés par le SRP-IMG, sont, eux, partagés. « Notre enquête (406 répondants, NDLR) montre que la moitié de nos adhérents est favorable au maintien de la durée du stage de pédiatrie à six mois et l’autre moitié est favorable à une fusion du stage de pédiatrie et de gynécologie. Étant donné les résultats, nous prônons donc la liberté de choix pour les internes », avance Margot Martinez, présidente du syndicat. À noter que le stage couplé en pédiatrie/gynécologie (trois mois + trois mois) est déjà en vigueur dans la grande majorité des subdivisions (22 sur 29).
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