Six mois après sa prise de fonction à la tête de la conférence nationale des doyens de médecine, le Pr Benoît Veber, doyen de la fac de médecine de Rouen, a profité d'une conférence de rentrée pour évoquer les « défis à venir » et dresser un premier bilan de son mandat. Parmi les dossiers principaux, la délicate réforme des études de santé (dans tous les cycles) et la controversée quatrième année d'internat de médecine générale.
Réussir le docteur junior de médecine gé
S'agissant de l'allongement du DES de médecine générale, le PU-PH a insisté sur le soutien appuyé des doyens, en dépit des polémiques. « La réforme du 3e cycle entre dans sa phase de maturité. L'enjeu va être de réussir, dans trois ans, la phase de docteur junior de médecine générale. C'est un complément de formation indispensable. Toutes les autres spécialités ont déjà cette année de docteur junior », a rappelé le patron des doyens.
Interrogé sur la rémunération de ces futurs docteurs juniors de médecine générale, le Pr Benoît Veber a estimé que le modèle avancé par l’ancien ministre de la Santé, François Braun, à savoir une rémunération de base complétée par une part de tarification à l’acte, avec une rétrocession de 20 % pour les internes (jusqu’à 4 500 euros par mois, NDLR), présentait une « iniquité évidente entre disciplines ». « Les docteurs juniors en médecine générale seraient donc mieux payés s'ils exercent en ambulatoire et en zone sous-dense. Il faut avouer que la situation n’est pas évidente et qu’elle néglige complètement l’exercice de la médecine générale non ambulatoire. » Pour le PU-PH, ce plafond fixé à 4 500 euros par mois renvoie « un message qui n’est pas bon alors qu’un praticien hospitalier en exercice est actuellement payé 3 800 euros par mois ».
Quant à la formation des maîtres de stage universitaires (MSU), point clé pour encadrer cette 4e année, le président des doyens a assuré que « des groupes de travail étaient en cours au ministère ». « Des séminaires de formation ont déjà commencé en médecine générale, je ne suis pas du tout pessimiste sur la capacité que nous aurons à recruter des encadrants, c'est intéressant pour eux », a-t-il estimé.
R1C : simplifier pour davantage de lisibilité !
Autre chantier délicat : la réforme du premier cycle des études de santé (R1C), pour lequel le patron des doyens réclame ouvertement une simplification. « Trois ans après son entrée en vigueur, nous tirons un bilan positif de la R1C (qui s'est traduite par la suppression de la réforme de la PACES au profit de deux nouvelles voies, PASS et L.AS). Toutefois, des améliorations sont souhaitables. La conférence des doyens souhaite donner plus de lisibilité et de cohérence à cette réforme car celle-ci peut paraître complexe à la fois pour les lycéens et les parents », a-t-il recadré. Preuve que tout n'est pas simple, un audit de la Cour des comptes sur la réforme du premier cycle est attendu avant début 2024, a annoncé le Pr Benoît Veber.
D'ores et déjà, le patron des doyens formulera plusieurs propositions à Sylvie Retailleau, la ministre en charge de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. En premier lieu, il préconise de « limiter » le nombre de licences accès santé (L.AS) pour offrir davantage de lisibilité aux étudiants. « Nous nous rendons compte que certaines L.AS ne débouchent que très rarement sur un succès d'entrée en deuxième année ! Les universités doivent donc faire le point sur les licences qui fonctionnent et celles qui fonctionnent moins. Par exemple, à Rouen, nous avons 13 L.AS et parfois seulement un seul succès. Nous devons donner de la clarté à cette réforme car les étudiants ne savent pas à quel saint se vouer », a-t-il estimé, faisant référence à certaines licences (droit) dont la compatibilité avec les études de santé demeure discutable. En revanche, la biologie ou la physique « ont du sens ».
Autre proposition : simplifier le processus d'interclassement des étudiants en L.AS. « C'est un système très complexe qui mène à beaucoup de confusion avec des étudiants qui se retrouvent avec des moyennes différentes de celles qu'ils avaient initialement. Je proposerai à Sylvie Retailleau de supprimer ce classement ». À la place, il suggère une épreuve unique santé à tous les élèves de PASS et de L.AS ce qui permettrait, selon lui, davantage de lisibilité et d'équité.
La R2C en bonne marche
Sur le deuxième cycle et l'accès au troisième cycle, le Pr Benoît Veber s'est montré confiant sur le déroulé des nouvelles épreuves dématérialisées nationales (EDN), qui auront lieu les 16, 17 et 18 octobre prochain (pour la première promotion concernée, qui entre en sixième année). « Les EDN blanches organisées en septembre sur la plateforme Uness se sont très bien passées. Nous sommes rassurés pour la suite », a fait valoir le patron des doyens, mettant en avant le nouveau système de notation, pondéré en fonction des vœux des étudiants.
Au sujet des premiers examens cliniques objectifs structurés (Ecos) qui auront lieu en mai prochain (épreuve de compétences qui entre en ligne de compte dans le nouvel accès à l'internat), « toutes les facultés sont en train de s'y préparer », a assuré le Pr Veber. « Nous devons former les enseignants au métier d'observateur. Lors de cette épreuve, l'idée est qu'il y ait deux enseignants par poste dont un extérieur à l'université. »
Rappelant enfin la tolérance zéro des doyens vis-à-vis des violences sexistes et sexuelles, le Pr Benoît Veber a fait le constat que « les étudiants en santé sont toujours en souffrance et qu'il faut trouver un moyen d'y remédier ». « Des pistes seront étudiées en partenariat avec les représentants étudiants pour optimiser la qualité des études et permettre aux jeunes femmes majoritaires à plus de 70 %, d'étudier sereinement. »
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