Je devais initialement passer ce semestre dans un service de médecine polyvalente. L’épidémie de coronavirus a modifié le programme. Mi-mars, au début du confinement, nous avons reçu notre premier malade atteint du virus. Le service de médecine a rapidement fait sortir tous ses patients fragiles et réduit le nombre d’entrées. Un service consacré à la prise en charge du Covid-19 s’est promptement ouvert dans une aile dédiée, où j’ai été amené à travailler. Cette réorganisation a été éprouvante. Pour entrer dans ce service fermé, il faut être en tenue de bloc. Pas de circulation avec le reste de l’hôpital. De fait, même au travail, nous sommes confinés. Paradoxalement, cette impression d’être isolés a sûrement aidé à resserrer les liens au sein des équipes.
J’ai été confronté à tout ce qui a été décrit dans les médias, notamment le rationnement des masques : deux FFP2 pour la journée. C’est très désagréable, surtout lorsque pendant la tournée du matin, quand on examine des patients positifs, on a l’impression permanente d’avoir un masque souillé qu’il est impossible de jeter en sortie de chambre. J’ai apprécié la solidarité de la population, avec la livraison à l’hôpital de surblouses, de masques ou de surchaussures par des menuisiers, volaillers, pharmaciens.
Ces dernières semaines, j’ai côtoyé plusieurs catégories de patients : ceux qui finissent en détresse respiratoire aiguë et que l’on intube dans le service avant de les envoyer en réanimation, et les personnes fragiles et âgées, elles aussi en détresse respiratoire, mais qui malheureusement ne sont pas éligibles à la réanimation et finissent par gonfler le nombre de décès annoncé chaque soir à la télé. J’ai connu également des patients moins graves qui étaient hospitalisés pour recevoir un peu d’oxygène avant de rentrer chez eux. Et enfin, j’ai assisté à la sortie de réanimation de patients extubés, et ressenti l’impression de voir des miraculés. C’est grâce à eux que l’on garde le moral face à cette nouvelle maladie.
L’isolement du service et le confinement ont compliqué la communication des patients avec leurs proches. Nous avons reçu une tablette pour organiser des conversations Skype. Mais qu’il est délicat de montrer à la famille le visage d’un de ses membres déconfit par la fatigue, avec un masque à haute concentration sur le visage… Emmanuel Macron a finalement autorisé les visites d’adieu à un malade en fin de vie. Cependant, durant les jours précédant le décès, il n’est pas facile de répondre aux deux ou trois appels par jour de l’entourage – ce n’est rien pour la famille mais beaucoup pour le service, c’est ce qui est le plus horrible dans cette histoire. Communiquer avec les proches des défunts, trouver les bons mots, est également une épreuve.
De cette catastrophe sanitaire, je retiendrai aussi beaucoup de choses sur le plan médical. J’ai appris à réaliser un test de dépistage nasopharyngé. Impressionnant de voir le nombre de centimètres qu’il faut insérer dans la narine des patients, ça ne donne pas envie d’être dépisté ! J’ai appris à poser des cathéters artériels, à gérer des paramètres de respirateur et/ou de VNI, j’ai aidé les infirmières en piquant des bilans et en faisant des gaz. L’unité étant fermée, j’ai aussi aidé les aides-soignantes à porter les patients.
Je n’oublierai pas cette période si particulière de ma carrière médicale. J’en resterai marqué à jamais.
Aviscène,en 3e année de DES à Lille, s’est fait connaître sur la Toile grâce à ses vidéos Youtube dans lesquelles il dépeint avec humour son quotidien d’étudiant.
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