La peur de la sanction a-t-elle joué en faveur de Marisol Touraine ? Au moment même où le gouvernement obtient ses premiers résultats sur l’inversion de la courbe du chômage, la ministre de la Santé peut se prévaloir, elle aussi, d’avoir tenu sa promesse sur l’accès aux soins.
En deux ans, les dépassements d’honoraires sont même en (léger) recul de 0,6 %. Le taux moyen de dépassement des spécialistes est passé de 56,9 % en 2011 à 56,3 % en 2013. Une baisse encore plus marquée pour les actes cliniques – dont le taux de dépassement recule de 76,6 % à 75 % – que pour les actes techniques dont le taux s’est stabilisé.
Aussitôt ces chiffres dévoilés, la semaine dernière, par l’Assurance Maladie, la ministre s’est félicitée « de ce retournement alors que, depuis plus de vingt ans, les taux de dépassement progressaient de façon continue ». Renversement de tendance qu’elle attribue à l’entrée en vigueur de l’avenant 8 sur les dépassements d’honoraires, dossier dont elle a fait, avec la généralisation du tiers payant, sa priorité.
Bons élèves : les gynécos, les ophtalmos et les psys...
Toutefois, si on regarde de près les chiffres de la Sécu, on s’aperçoit que même si les résultats sont là, tous les médecins concernés n’ont pas modéré leurs tarifs. Alors que les gynécologues-obstétriciens, les ophtalmologues et les psychiatres font figure de bons élèves, avec des baisses respectives de -2,4 %, -2% et -7,4 %, les gastro-entérologues et les radiologues ont, eux, augmenté leurs dépassements : de 35,6 à 37,1 % du tarif Sécu pour les premiers et de 35,7 à 36,9 % pour les seconds.
Dans le même temps, la part de spécialistes en secteur 2 progresse : ils représentent désormais 43 %. Pour info, sans surprise, celle des généralistes de secteur 2 continue de baisser. Ils ne sont plus que 9,5 %.
Si ces premiers résultats sont plutôt positifs, mais modestes, Marisol Touraine compte pousser plus loin son avantage. La preuve : la semaine dernière, la ministre de la Santé a donné le coup d’envoi des négociations avec les complémentaires santé, dans le cadre de la prochaine refonte des contrats solidaires et responsables.
L’idée est d’adapter ces contrats pour qu’ils soient incitatifs à consulter dans le nouveau secteur à dépassements modérées. Alors que ce Contrat d’accès aux soins (CAS) a déjà séduit environ près de 10 000 médecins (9 646 exactement) – soit un tiers des praticiens visés par le dispositif – les syndicats appellent maintenant les complémentaires santé à mieux rembourser aux assurés les dépassements d’honoraires des médecins signataires.
Tout en demandant aux mutuelles de « s’engager dans une démarche de responsabilité », la ministre n’a pas voulu fixer le curseur. Pour les hors CAS, elle a néanmoins soutenu le patron de la Mutualité Française sur la nécessité d’un taux de remboursement qui soit inférieur à la moyenne des dépassements (80 % du tarif Sécu) pour être suffisamment incitatif. Étienne Caniard a, de son côté, proposé de rembourser les dépassements à hauteur de 100 % pour les médecins adhérents au CAS et de 50 % pour les non-signataires. La balle est dans le camp du ministère.
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