C’est peut-être la goutte d’eau qui risque de pousser SOS médecins Auxerre (Yonne) à jeter l’éponge. Jeudi dernier, un de ses trois médecins généralistes en consultation a été agressé verbalement dans les locaux, selon nos confrères de France Bleu Auxerre.
Contacté par Le Quotidien, le Dr Philippe Mifsud, président de l’association, explique que son confrère venait de terminer l’examen d’une aide-soignante dans un Ehpad et était en train de rédiger son arrêt de travail de trois jours. D’un seul coup, un individu menaçant est entré « brutalement » dans la salle de consultation et a exigé que le médecin rallonge la durée d’arrêt de travail à dix jours. « L’homme s’avère être le mari de la patiente. Il a traité mon collègue de “sale mouton” et lui a dit que s’il ne le faisait pas, ça allait “très mal se passer pour lui aujourd’hui” », poursuit le Dr Mifsud. Le médecin agressé a réussi à calmer l’individu pour « ne pas avoir de drame ». Alerté, le président de l’association locale de SOS a appelé le commissariat. L’agresseur de 42 ans, interpellé par la police, a été placé en garde à vue. « Le litige est lié à la durée d’arrêt de travail et c’est nouveau, explique le généraliste. Les patients sont très exigeants car ils savent que la Sécu nous met la pression ».
« Nous sommes livrés à nous-mêmes »
Dr Philippe Mifsud, président de SOS Médecins Auxerre
Cette nouvelle affaire intervient moins de deux mois après une précédente agression concernant cette association de SOS où exercent trois généralistes. En décembre, un praticien avait cette fois été roué de coups par le mari d’une patiente, après avoir attendu plusieurs heures en salle d’attente. Dans ce territoire touché par la désertification médicale, « la population est exaspérée de ne pas trouver de médecins traitants. Il y a beaucoup de patients âgés ici », ajoute le médecin.
Malgré un plan sur la « sécurité des soignants » décliné par l’ancienne ministre Agnès Firmin Le Bodo en septembre, « nous sommes livrés à nous-mêmes, se désole le Dr Mifsud. « La solution ne peut venir que de nous car il ne se passe rien, ni du côté de la municipalité, ni de l’ARS, ni de la préfecture », regrette-t-il.
Depuis janvier 2024, l’association a financé elle-même l’installation de caméras de surveillance dans les locaux. Pour l’heure, elle refuse de recruter un vigile car « on ne fait pas de médecine sous surveillance ». « Il n’empêche : la fermeture définitive de l’antenne fait partie de notre réflexion depuis quelque temps », confesse le président de SOS médecins Auxerre.
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