Dr Bernard Plédran*

« Ce jour-là, j’ai fait mon boulot consciencieusement »

Publié le 22/03/2013
Article réservé aux abonnés

Quelle leçon avez-vous tiré de votre condamnation ?

Dr Bernard Piédran. Si le procès en première instance a été expédié, j’ai été surpris de ma condamnation en appel. Le juge d’instruction a voulu voir les choses par le petit bout de la lorgnette : en prenant en compte systématiquement les éléments qui pouvaient me faire plonger et en écartant les circonstances atténuantes. On a voulu faire de moi un bouc émissaire. Avant moi, trois permanenciers ont mal orienté les appels mais n’ont pas été inquiétés. C’est le spécialiste parisien de l’anévrisme, qui ne voit que ça, qui a été interrogé en tant qu’expert… Pas un généraliste comme moi ! Je suis désolé pour la patiente qui est décédée mais je le répète : ce jour-là, j’ai fait mon boulot consciencieusement.

Pratiquez-vous encore la PDS, en dépit de cette mésaventure ?

Depuis la création d’un des premiers centres 15, à Bordeaux, j’ai été un des premiers médecins à m’engager dans cette mission de service public. Cependant, dès que l’enquête a démarré, j’ai pris la décision d’arrêter les gardes. Personne ne m’y obligeait, mais c’était pour moi une mesure de bon sens. Je ne voulais pas que mes confrères se sentent mal à l’aise. Heureusement, au cabinet, mes patients, qui me connaissent depuis trente ans, continuent de me faire confiance. Ils lisent mon affaire dans la presse et ils disent : « ça, ce n’est pas vous, Docteur ».

Que conseillerez-vous à vos confrères ?

Aujourd’hui, je suis amer et désabusé. La garde est un exercice médical compliqué où l’on doit se faire par téléphone une opinion extrêmement rapidement. J’ai simplement fait mon boulot et je prends six mois. Faut-il continuer à réguler dans ces conditions-là ? Si vous êtes raisonnable, vous arrêtez. Être généraliste, ce n’est pas faire des gardes ou des régulations au centre 15 mais soigner à son

cabinet des pathologies chroniques qui sont en train de devenir de plus en plus lourdes. C’est ça la vraie vie. Les gardes, ce n’est qu’un plus. Et si c’est une source d’emm…, il vaut mieux arrêter.

*Généraliste, ancien régulateur au SAMU Gironde, condamné à six mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Bordeaux.

Source : lequotidiendumedecin.fr