Mélenchon bon élève et Fillon cancre sur la santé publique

Publié le 11/04/2017
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Crédit photo : Capture d'écran

Dans la campagne présidentielle, le lobby de la santé publique a attendu la dernière ligne droite pour se faire entendre. Mais à dix jours du premier tour, il a rendu publiques les réponses des candidats à son questionnaire de santé publique. Et, surprise : le grand gagnant est Jean-Luc Mélenchon avec 20/20 ! Et le perdant est François Fillon, avec un très mauvais 2/20… "Merci Monsieur Jean-Luc Mélenchon, il fallait oser le faire et montrer que les politiques pouvaient avoir du courage et prendre des risques !" se félicitent les experts de santé publique, qui à l'inverse épinglent le candidat des Républicains, qui, sur ce terrain "situe à un niveau quasiment nul sa volonté d’agir sur les facteurs d’insécurité sanitaire évitable les plus destructeurs."

Ce petit club des ténors de la santé publique fait parler de lui depuis que les "cinq sages de la santé publique" ont été à l'origine de la loi Evin au début des années quatre-vingt-dix. Et depuis, à chaque élection présidentielle il se reconstitue pour l'occasion. Actuellement, ils sont sept : aux "historiques" Gérard Dubois, Claude Got et Albert Hirsch, se sont joint Irène Frachon, Serge Hercberg, Catherine Hill et Chantal Perrichon. Leur constat est sévère sur les réponses des compétiteurs - "Jamais nous n’avions observé une telle rupture entre les candidats"- comme sur la "trumpisation de la gestion publique", qui n'épargne pas la santé, selon eux.

Pour établir ce classement, les sept personnalités avaient envoyé à tous les candidats une liste de 20 questions pour tester leur volonté d'agir contre des facteurs de risque évitables qui sont "à l'origine de 100 000 morts prématurées par an". Le champion de la "France insoumise" a décroché un 20/20 car il a répondu oui à l'ensemble des mesures préconisées par ces experts, y compris celles pouvant fâcher des électeurs. Benoît Hamon obtient un 15, Marine Le Pen 8, Emmanuel Macron 7 et François Fillon 2. Nathalie Arthaud a 13 et Jacques Cheminade 12. Les autres n'ont pas répondu. Nicolas Dupont-Aignan n'avait pas été contacté.

lSi l'adoption de l'étiquetage nutritionnel "Nutriscore" ou la mise en place d'incitations financières à l'activité physique font l'unanimité parmi les candidats, d'autres sujets font beaucoup moins consensus. Sur la prévention, il a été ainsi demandé qui était prêt à augmenter fortement le prix du paquet de cigarettes : Fillon, Hamon et Le Pen ne se mouillent guère. Emmanuel Macron accepte d'augmenter le prix du paquet de cigarettes à 10 euros dès 2017, François Fillon refuse et Benoît Hamon propose d'augmenter les taxes de 10 % par an, mais sans répondre positivement. Aucun de ceux-là ne se déclare franchement pour un paquet à 20 euros à la fin de son quinquennat, sauf Mélenchon.

On leur a ausi demandé si, pour lutter contre l'obésité, ils étaient prêts à agir contre les aliments trop gras, trop sucrés, trop salés par l'intermédiaire d'une réglementation de la publicité et des taxes : seuls Hamon et Mélenchon sont pour des mesures drastiques. Taxer les aliments proportionnellement notamment à leur teneur en gras, sucre et sel est refusé par François Fillon, Marine Le Pen et Emmanuel Macron. "Le lobby de la nourriture industrielle a encore de beaux jours devant lui !" se désole le groupe des sept.

Sur la sécurité routière, l'augmentation du nombre de radars mobiles (refusé par la quasi-totalité des candidats) ou la limitation de vitesse à 80 km/h sur deux voies (seuls Mélenchon et Hamon opinent) faisaient aussi partie des mesures proposées par les experts.

Quant au remplacement de la mention "à consommer avec modération" par la quantité d'alcool pur en grammes et le nombre de calories dans chaque contenant, il est accepté par trois candidats (Hamon, Macron et Mélenchon), et considéré comme seulement "à étudier" par Fillon.

L'encadrement des produits de santé fait aussi partie des questions posées aux candidats, avec notamment deux questions sur l'indépendance du DPC et l'interdiction des visiteurs médicaux. Sur le dernier point, Marine Le Pen semble d'accord, mais aussi la gauche de la gauche, en dépit des 12 000 suppressions d'emplois qu'une telle mesure supposerait. 

Les experts accompagnent les résultats des candidats par des appréciations sans concession. Ils jugent ainsi Emmanuel Macron "ambigue" sur les limitations de vitesse, épinglant de "belles paroles qui n'ont pas de fondement sérieux". Ils critiquent le "touche pas à mon vin" avancé par Marine Le Pen pour justifier des aménagements à la loi Evin. Et ils jugent "irresponsable" et "incompréhensible" l'opposition des Fillon, Hamon, Le Pen et Macron à l'interdiction du signalement des radars. Les petits candidats ne sont pas épargnés par les critiques. À propos de Nathalie Arthaud, les experts observent que "la santé publique ne l'intéresse pas". Et ils s'indignent du positionnement de Jean Lassalle, qui trouve qu'on retire trop de points aux automobilistes. 


Source : lequotidiendumedecin.fr