Le gouvernement a-t-il ouvert un nouveau front avec deux spécialités médico-techniques ? Radiologues et médecins biologistes libéraux ne décolèrent pas depuis la présentation par Bercy, ce jeudi, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2025), qui prévoit d’encadrer strictement la co-construction de nouveaux accords tarifaires avec la Sécu…
En clair, pour ces deux secteurs « plus financiarisés que d’autres » (imagerie et biologie), le PLFSS (article 15) inscrit dans le marbre la nécessité de conclure des accords pluriannuels de maîtrise (objectifs quantitatifs, engagements des partenaires conventionnels, modalités de suivi et mesures correctrices) pour « sécuriser les financements ». Une nouvelle forme de négociation le pistolet sur la tempe ? Argument avancé, les dépenses d’assurance-maladie en ville y sont très dynamiques (+6,5 % dans le secteur de la biologie, +8,5 % de volume dans le secteur de l’imagerie, forfait technique et actes d’imagerie).
Et en application directe de cet article, dans sa recherche d’économies rapides, l’exécutif entend réaliser « au moins 300 millions d’euros » sur les dépenses d’imagerie sur les années 2025 à 2027. À défaut d’accord au 30 avril 2025, le directeur de la Cnam pourra procéder aux baisses autoritaires de tarifs d’imagerie.
« Vicieux »
« Ce n’est ni acceptable, ni possible », tonne le Dr Jean-Philippe Masson, président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). Un coup de tonnerre auquel il ne s’attendait pas et qu’il juge « particulièrement vicieux parce que cette mesure est anti-conventionnelle. Par dérogation à la convention, le DG de la Cnam pourrait décider arbitrairement de baisser la valeur des actes ». La fédération déposera un amendement demandant la suppression de cette mesure.
Son de cloche identique du côté des médecins biologistes, en conflit ouvert avec la Cnam depuis plusieurs mois, qui vont faire de même. « Cet article est une rupture complète avec la politique conventionnelle. On ne peut l’accepter », fulmine le Dr Jean-Claude Azoulay, président du Syndicat national des médecins biologistes (SNMB).
« Réaliser 300 millions d’économies sur le secteur de l’imagerie libérale sur trois ans, ce n’est pas tenable ! », poursuit le Dr Masson. « Et j’espère que la Cnam n’imagine pas qu’elle pourra récupérer 100 millions d’euros dans les huit mois qui resteront en 2025 si on signe un protocole fin avril ». Le président de la FNMR entend s’en expliquer avec Thomas Fatôme, DG de la Cnam, à l’occasion de la prochaine réunion conventionnelle programmée fin octobre. L’ordre du jour ? Pertinence et dépistage organisé…
Accompagnement des prescriptions : usine à gaz ?
Les partenaires conventionnels auront l’occasion de discuter d’un second texte (article 16 du projet de loi), également dans le collimateur des radiologues et des biologistes. Même si, sur le papier, son effet urticant est moindre. « Pour maîtriser la dynamique de croissance des dépenses d’assurance-maladie et limiter le mésusage associé à certaines prescriptions », le gouvernement souhaite étendre un dispositif d’accompagnement des prescripteurs, afin de s’assurer que les ordonnances entrent bien dans le cadre des recos de la HAS ou des règles de nomenclature. Là encore, la biologie et l’imagerie médicale sont cités (mais aussi les transports de patients). « Ce dispositif pourrait peut-être se révéler pertinent si les échanges étaient totalement dématérialisés, mais ce ne sera pas avant 2026, lâche le Dr Azoulay. Je crains fort une usine à gaz de plus ».
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