Suppression progressive des régimes spéciaux, valeur du point de retraite ou encore fixation d’un âge d’équilibre avec un système de bonus-malus… Ce mercredi, Édouard Philippe a présenté les contours de la réforme des retraites, élaboré par Jean-Paul Delevoye, qui sera soumis au vote du parlement au cours de l’année 2020.
La perspective de l'instauration d'un système universel par points inquiète depuis des mois les médecins libéraux. Ceux-ci craignent notamment une nette baisse de leur pension — minimisée par les équipes de Jean-Paul Delevoye —, de devoir partir plus tard à la retraite ou encore que les réserves de la Carmf (environ 7 milliards d’euros) ne leur échappent.
« Pas de siphonnage »
Sur ce dernier point, le Premier ministre s’est montré rassurant. « Les réserves resteront dans les caisses des professions concernées et auront vocation à accompagner la transition vers le système universel, a assuré Édouard Philippe. Il n’y aura pas de siphonnage, ni de hold-up. »
Le maintien des réserves dans le giron de la profession était l’une des lignes rouges qu’avaient fixées les syndicats de médecins libéraux dans un communiqué commun à la fin de l’été. « Je n’ai jamais eu l’impression en écoutant Jean-Paul Delevoye que ces réserves étaient réellement menacées, souligne le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. Je me réjouis que ce soit gravé dans le marbre ».
Malgré cette annonce, le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML-S, a estimé sur Twitter que les réserves des professions libérales et indépendantes « étaient détournées de leur fonction » puisqu'elles seraient dédiées à la transition et non aux pensions. « Des cotisations vont payer des cotisations ! », s'étrangle-t-il.
Par ailleurs, le Dr Marty a indiqué que la fermeture des cabinets du 3 février, annoncée en octobre par le collectif interprofessionnel SOS Retraites (dont font partie l'UFML-S et la FMF), pourrait être avancée.
Le seuil de 3 PASS maintenu
Si les réserves reviendront bien aux médecins, ceux-ci ont en revanche vu une de leurs exigences rejetée : celle d’un abaissement du seuil de revenus sous lequel le taux de cotisation sera le même pour tous les Français (28,12 %).
La profession réclamait que celui-ci soit fixé à un PASS (plafond annuel de sécurité sociale, environ 40 000 €), afin de prendre en compte les spécificités de la profession, au lieu de trois (environ 120 000 €). Mais pour Édouard Philippe, comme pour Jean-Paul Delevoye, maintenir ce seuil de trois PASS permettra de garantir la solidarité en embarquant la quasi-intégralité des Français. « Faut-il renoncer à la solidarité pour les 1 % qui peuvent par ailleurs prendre un complément individuel ? », avait ainsi interrogé en septembre dans nos colonnes, Jean-Paul Delevoye.
Le Syndicat national des médecins concernés par les retraites (SNMCR) a une nouvelle fois regretté ce choix : « Une assiette de cotisation à 120 000 euros par an avec un taux de cotisations fixé jusqu’à 40 000 euros à 28,12 %, puis au-dessus (de 40 000 à 120 000 euros) à 12,94 %, entraînera à terme une baisse des cotisations, mais aussi mécaniquement et surtout une baisse plus importante des pensions [...]. Même avec un mécanisme " compensateur " de baisse de CSG, ça ne suffit pas ! ». Le SNMCR appelle à la profession à se mobiliser pour que la réforme des retraites soit « adaptée à l’exercice libéral des médecins ».
Après les annonces du Premier ministre, il ne reste désormais plus qu'une réunion, prévue le 7 janvier, au Haut-commissaire aux retraites pour convaincre les médecins de ne pas rejoindre la contestation.
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